Kino
Digital : Cinéma nordique |
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Ici,
on vous invite à survoler en quelques pages les
notules "critiques" présentes sur certains
tests dvd de la rubrique "Cinéma nordique"
de Kino Digital. Les films — inédits en
France — sont classés par années
de sortie. Dans une même année, le classement
est fait par ordre alphabétique de titres originaux.
Vous trouverez essentiellement des films suédois,
mais aussi quelques titres norvégiens, danois,
islandais et finlandais. Bien sûr, les avis exprimés
ici n'engagent que le ouebmestre du site. |
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Barnen
på Luna / Les enfants de la Luna (Tobias Falk,
2000) |
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De
nos jours, en Suède, quatre enfants de 14 à
8 ans — Glenn, Torsten, Mercedes et sa petite
soeur Pärlan — perdent leurs parents respectifs
dans un accident d'avion. Ils se rencontrent pour la
première fois lors d'une cérémonie
religieuse en mémoire des disparus, et, lorsqu'une
assistante sociale leur annonce qu'ils vont être
placés dans des familles d'accueil, ils décident
de fuir. Ils embarquent à bord de la Luna —
un bateau appartenant aux parents de Glenn — et
s'en vont chercher refuge au milieu des 24.000 îles
de l'archipel de Stockholm...
En cinq mots comme en cent : c'est de la belle ouvrage.
On nous sert ici — dans un cadre naturel de premier
choix — une jolie histoire qui aurait pu s'intituler
"De l'art de faire son deuil". On en profite
aussi pour nous rappeler que la vie est un don fragile
et qu'il n'est jamais trop tôt pour profiter des
êtres qui nous sont chers (incidemment, que d'orphelins
dans le cinéma suédois de ces 10 dernière
années : "Den bästa sommaren"
en 2000, "Elina, som om jag inte fanns" en
2002, "Misa Mi" en 2003, "Kid Svensk"
en 2007, "I taket ljuser stjärnorna"
en 2009... on finirait par croire qu'il s'agit d'un
genre en soi). Côté interprétation,
c'est tout sauf gnangnan, les gamins s'en sortent vraiment
bien. Les connaisseurs s'amuseront tout particulièrement
à retrouver Tove Edfeldt, qu'on avait découverte
en 1997 dans "Sanning eller konsekvens", et,
surtout, Kim Jansson — 8 ans ici — que l'on
reverra à 12 ans dans "Misa mi" (2003)
; deux petites bonnes femmes au naturel vraiment emballant.
Quant à Totte Steneby — qui jouait Tobbe,
l'amoureux tête à claques de Sabina dans
"Sanning eller konsekvens" — il est
tout bonnement méconnaissable dans le rôle
de Glenn... |
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Den
bästa sommaren / Un été en Suède
(Ulf Malmros, 2000) |
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Juin
1958, Mårten et Annika, deux orphelins de 10/11
ans, sont confiés à un entrepreneur de
pompes funèbres le temps des vacances d'été.
L'accueil est plutôt austère. Les enfants
parviendront-ils à dérider leur hôte
?
On tient-là un film "retour dans les années
50" dans la veine de ce qu'a fait Lasse Hallström
dans "L'oeuvre de Dieu, la part du diable"
(qui se passe, lui, dans les années 40). Si l'on
aime le style vestimentaire et les grosses voitures
de cette époque, on est à la fête.
Côté scénario, on alterne entre
l'histoire du couple d'enfants — mention spéciale
à la jeune Rebecca Scheja qui fait preuve d'une
belle assurance — et celle du croque-mort qui
en pince pour l'institutrice. C'est un film familial,
tout le monde peut y trouver son compte : les petits
et les grands. On reprochera seulement à la jaquette
du DVD de vendre un peu trop la mèche ! |
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Herr
von Hancken (Rumle Hammerich, 2000) |
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En
Suède, au début des années 1800,
le vieux chevalier von Hancken mène une vie impécunieuse
de hobereau, en compagnie de sa femme, de sa fille Nora,
de son fils handicapé et du jeune précepteur
de ce dernier. Se croyant atteint de tous les maux de
la terre, il part en cure à Iglinge en emmenant
avec lui toute sa famille. Lorsque le médecin
lui annonce qu'il ne lui reste que six semaines à
vivre, l'homme perd peu à peu la tête et
se transforme en une sorte de Don Quichotte : il tombe
amoureux d'une courtisane, entraîne les curistes
dans l'organisation d'une fête en l'honneur du
roi (qui, il en est sûr, va venir leur rendre
visite), puis, voyant qu'il s'est fourvoyé, se
lance dans une mini-révolution et dans la proclamation
d'une république...
Ce téléfilm en quatre parties d'environ
52 minutes chacune est une libre adaptation d'un roman
de Hjalmar Bergman (1883-1931). Si l'histoire n'est
pas d'une limpidité exemplaire, c'est un travail
de qualité, bien écrit, bien interprété,
à des années lumière du calamiteux
"Révolte des Chenapans" (Snapphanar)
produit en 2006. On y retrouve Per Oscarsson, dans un
rôle qui n'est pas sans rappeler celui de "La
Faim" (tourné 34 ans plus tôt). On
y retrouve également Mona Malm (jeune première
dans les années 1950) et Tuva Novotny (qu'on
voit beaucoup dans les films "made in Sweden"
depuis 2000). |
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Sleepwalker
(Johannes Runeborg, 2000) |
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un
matin, Ulrik Hansson se réveille dans un lit
maculé de sang. Sa femme et ses enfants ont disparu.
Se sachant somnambule, il en vient vite à se
demander s'il ne les a pas tués dans son "sommeil".
Une enquête haletante démarre...
Sous des dehors peu engageants (esthétique téléfilm
allemand du vendredi soir sur Arte, rythme à
l'avenant, un Ralph Carlsson au charisme relatif), le
film mérite le détour. Avec peu de moyens,
mais un scénario "malin", Runeborg
nous sert un suspens somme toute assez réjouissant.
Cela dit, la qualité de ce "thriller"
est peut-être sa "limite" : en effet,
une fois le mystère éventé, on
est bien embêté pour les revisionnages
suivants. Ce film a obtenu le Grand Prix "Sang
Neuf" du festival de Cognac 2001. |
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Kattbreven
/ Les lettres du chat (Christina Olofson, 2001) |
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en
préparation... |
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Så
vit som en snö / Blanche comme la neige (Jan
Troell, 2001) |
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En
Suède, dans les années 1900 / 1920, on
suit une version romancée de la vie d'Elsa Andersson,
fille de propriétaire terrien de Scanie qui fut
la première femme du pays à piloter un
avion et à sauter en parachute...
Oh la belle ouvrage que voilà ! Nul doute que
chez nous, un film de ce genre aurait droit à
l'étiquette "qualité France"
et l'on peut parier que les esprits forts ne manqueraient
pas de railler son côté "académique"
à la Bille August. Mais pourquoi jouer les bégueules
? On a là du travail léché, ce
qu'on pourrait appeler du "cinéma de papier
glacé", et alors ?... S'il faut faire un
reproche à Jan Troell, c'est plutôt de
nous servir un scénario manquant singulièrement
de nerf. De fait, pendant les 2h28 que dure l'aventure
on balance sans cesse du rêve à la mélancolie,
rien n'est jamais spectaculaire et les exploits de la
jeune aviatrice sont traîtés comme autant
de non-événements ! On en vient presque
à se demander si le rêve de conquête
du ciel n'est pas qu'un prétexte et si les problèmes
existentiels de l'héroïne ne sont pas le
vrai sujet du film. Si c'est le cas, on nage en plein
malentendu ! Ceci dit, même s'il aurait gagné
à être un peu ramassé et un peu
plus "nerveux", ce voyage dans la Suède
du début du 20e siècle — tout en
flash-backs comme dans certains Bergman 1ère
période — se déguste comme une nouvelle
de Tchekov ou de Hjalmar Söderberg... Les connaisseurs
retrouveront ici Björn Granath (vu dans "Pelle
le conquérant" et "Les meilleurs intentions"),
Björn Kjellman (vu récemment dans "Musique
populaire de Vittula") et Stina Ekblad (vue dans
"Infidèle" de Liv Ullmann ou dans "Les
Braqueurs" de Peter Lindmark). |
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Elina
: som om jag inte fanns / Elina (Klaus Härö,
2002) |
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Dans
une région finnophone du nord de la Suède,
dans les années 1950, la petite Elina retourne
à l'école après avoir été
longtemps malade. Hélas, elle entre très
vite en conflit avec son institutrice...
Sur le plan formel, on tient là un joli film
de "papier glacé" : beaux paysages,
petits enfants blonds attachants, joli travail du directeur
de la photographie, jolie musique de Tuomas Kantelinen
(qui rappelle un peu celle de Rachel Portman sur "L'oeuvre
de Dieu, la part du Diable" ou "Le sourire
de Mona Lisa"). Sur le fond, les scénaristes
nous servent une sorte de "David contre Goliath"
en milieu scolaire, avec, en arrière-plan, une
petite réflexion sur les rapports tendus entre
culture dominante et minorités (en France, le
film aurait mis en scène une petite Bretonne
du début du XXe siècle en révolte
contre son "méchant" instituteur voulant
l'obliger à parler français). Cela part
d'un bon sentiment, bien sûr, mais cela n'évite
pas le manichéisme. Certes, le personnage de
l'institutrice est méprisant et borné,
mais la petite Elina, elle, n'est pas la moitié
d'une effrontée... Quoi qu'il en soit, le spectacle
se regarde avec tendresse. Ce film a obtenu le prix
Ingmar Bergman en 2004. |
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Grabben
i graven bredvid / Le mec de la tombe d'à
côté (Kjell Sundvall, 2002) |
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Désirée,
veuve de 35/40 ans, se sent à l'étroit
dans sa petite bibliothèque de province. Elle
pense à partir pour Stockholm. Un jour, elle
fait la connaissance de Benny, quarantenaire célibataire
s'occupant seul d'une exploitation agricole. Cupidon
rôde dans les parages, seulement, bien des choses
séparent les deux candidats à l'amour...
On tient-là une version suédoise —
tournée à Luleå, dans le nord du
pays — de "un fossé les sépare,
mais ils en pincent l'un pour l'autre", une énième
version de "la belle et la bête". On
y va chapitre par chapitre, on a droit notamment aux
couplets "gens de la ville / gens de la campagne",
"intellos / travailleurs manuels"... Rien
de bien nouveau, rien de détestable non plus.
Pour peu qu'on soit sensible à ce genre cinématographique,
on pourra trouver la balade sympathique (on regrettera
simplement qu'il n'ait pas fait plus beau quand le film
a été tourné). |
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Den
osynlige / L'invisible (Joel Bergvall & Simon
Sandquist, 2002) |
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Annelie,
jeune fille rebelle et violente est dénoncée
à la police après un casse. Croyant qu'elle
a été "balancée" par
Niklas — élève modèle, fort
en littérature, a priori béni des dieux
mais finalement assez mal dans sa peau — elle
lui tend une embuscade avec quelques complices, le roue
de coups et le laisse pour mort dans la forêt...
Quelques heures plus tard, le jeune homme s'en revient
en ville et finit par s'apercevoir qu'il n'est plus
visible par personne...
Il s'agit essentiellement d'un film "fantastique"
pour adolescents. C'est une variante suédoise
de "Ghost" ou d'"Always", avec un
côté métaphorique sur "ces
jeunes adultes" que personne ne voit ; rien de
réellement nouveau. Cela dit, l'ensemble fonctionne
plutôt bien et il y a même un petit suspens.
Contrairement aux méchants de pacotille qu'on
a pu voir dans "Innan frosten" (aventures
de Kurt Wallender), la jeune fille qui interprète
Annelie est bien habitée par son rôle (qui
se révèle petit à petit moins monolithique
que prévu ; à moins, bien sûr, que
le spectateur ne finisse tout simplement par être
victime du syndrome de Stockholm) et dégage une
violence convaincante. Elle parvient carrément
à voler la vedette au gentil garçon qui,
lui, fait une prestation plus convenue. Le seul bémol
est à chercher du côté des forces
de l'ordre où, quoi qu'il arrive, on fait preuve
d'une équanimité et d'une urbanité
telles que c'en est suspect... Pour l'anecdote, on signalera
que la musique qui ouvre le film fait furieusement penser
à celle composée par Graeme Revell pour
le film "The Negociator" (F. Gary Gray, 1998). |
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Hannah
med H / Hannah avec deux H (Christina Olofson, 2003) |
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Hannah,
jeune suédoise de 17 ans trois quarts, vit seule
dans son joli petit appartement de Malmö. Elle
a l'esprit poète, se pose de douces questions
existentielles (comment trouver une façon différente
d'être jeune ?), sèche les cours de temps
à autre et s'amuse à semer ses vers un
peu partout. Un jour, dans un café, un homme
de 40 ans l'aborde en lui citant du Shakespeare : "Le
monde est une scène de théâtre,
les hommes et les femmes y sont des acteurs, ils entrent,
ils sortent..." Et voilà une relation qui
commence. Elle est bientôt suivie d'une autre
avec un jeune réfugié de Bosnie, puis
d'une autre avec un skinhead aux idées larges.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes
si de mystérieux coups de téléphone
anonymes ne venaient pas simultanément semer
le trouble...
On l'aura compris, on tient là un film de "djeunz"
! L'héroïne, parfaitement à l'aise
dans ses baskets, sans le moindre soucis matériel,
croque la vie à pleines dents. Elle va, elle
vient, elle parle aux miroirs, aux canards... En soi,
le spectacle n'est pas vraiment déplaisant mais
il ne peut suffire à maintenir longtemps l'attention
du spectateur. C'est donc le mystère des coups
de fil anonymes qui vient mettre un peu de sel dans
tout ça. Si l'on comprend assez vite qui en est
l'auteur, on ne découvre qu'à la fin ce
qui se cache derrière tout ça. Et à
ce moment-là : t-t-tsaaan, gros coup de théâtre
! (ce qui, du reste, est bien embêtant pour les
revisionnages) On n'en dira donc pas plus ! Incidemment,
ce film est une occasion amusante de retrouver Tove
Edfeldt — vue à 13 ans dans "Sanning
eller konsekvens" puis à 16 ans dans le
feuilleton "Barnen på Luna" —
avec quelques centimètres et — aussi —
quelques kilos en plus. |
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Kommer
du med mig då ? / Un amour sur toile (Kjell
Grede, 2003) |
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en
préparation... |
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Misa
mi / Misa et les loups (Linus Torell, 2003) |
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Misa,
petite Suédoise d'environ 10 ans, éprouve
un certain vague à l'âme. Elle passe le
plus clair de ses nuits à jouer sur son téléphone
portable, à penser à sa mère récemment
décédée et ne comprend pas que
son père ait fini par se consoler dans les bras
d'une autre femme. Un jour, ce dernier lui propose d'aller
passer les vacances en Scanie, mais elle refuse et décide
à la place d'aller rejoindre sa grand-mère
maternelle dans le nord du pays. Là, dans le
grand paysage de la toundra, elle fait bientôt
la connaissance de Gustav, le fils d'un éleveur
de rennes. Surtout, elle découvre qu'un loup
sème le trouble dans les environs...
Il s'agit d'un joli film pour enfants. Joli par son
histoire (une petite fille retrouve un sens à
la vie en croisant le chemin d'une louve et de ses louveteaux),
joli aussi par ce qu'il montre (les paysages de la zone
arctique de la Suède sont particulièrement
télégéniques au format cinémascope).
Côté distribution, on retrouve ici Kim
Jansson, l'adorable puce de la série "Barnen
på Luna" (2000 ; à l'époque
du tournage, elle n'avait que 8 ans), avec quelques
années en plus, une voix évidemment plus
grave et un côté pré-ado nettement
moins expansif. Au début du film, il arrive que
son élocution un tantinet "maniérée"
agace un peu, mais elle passe assez rapidement à
des intonations plus sobres (comme le garçon
qui lui donne la réplique par exemple). Quant
aux loups, ils sont joliment filmés ! Enfin,
les connaisseurs auront plaisir à retrouver —
dans le rôle de la grand-mère — Lena
Granhagen (65 ans ici) qui fut la rigolote Sonja Svensson
dans la série des Hillman d'Arne Mattsson (1958-1963).
Pour info : en 2004, ce film a reçu le Grand
Prix du Festival international du Film d'Enfants de
Francfort ex aequo avec "Verder dan de Maan"
("Au-delà de la Lune"), film du réalisateur
belge Stijn Coninx. |
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Norrmalmstorg
(Håkan Lindhé, 2003) |
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Jeudi
23 août 1973, à Stockholm, un homme armé
pénètre dans une banque de Norrmalmstorg
et prend quatre employés en otage. Bien sûr,
il demande de l'argent et une voiture pour s'enfuir.
Mais il demande aussi qu'on fasse venir un certain Clark
Olofsson, un criminel incarcéré depuis
1966. Que veut-il réellement ?
Ce téléfilm est un docu-drama consacré
à la célèbre prise d'otages qui
est à l'origine de l'expression "syndrome
de Stockholm". On y voit comment — pendant
les six jours qu'ont duré les négociations
— des liens ont fini par se tisser entre les criminels
et les otages, comment ces derniers ont fini par s'interposer
entre leurs ravisseurs et la police. Il n'y a pas grand
chose à ajouter, on assiste plus à une
leçon d'Histoire qu'à une séance
de cinéma. Le film n'est pas très long
(1h25), entrecoupé de documents d'archives, on
n'a pas réellement le temps de s'ennuyer. Seule
la musique — genre t-t-tsaaan — en fait
parfois un peu trop. Chose amusante : le téléspectateur
finit, lui aussi, par éprouver une certaine sympathie
pour les preneurs d'otages et par souhaiter que toute
cette affaire se termine bien. Enfin, pour les connaisseurs,
c'est l'occasion de retrouver — entre autres —
Tova Magnusson et Tuva Novotny. |
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Smala
Sussie / Petite Susie (Ulf Malmros, 2003) |
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Erik
en a marre de vivre dans un patelin où il arrive
au cinéma de ne passer que la moitié des
films, et, un beau jour, il fait ses valises pour Stockholm.
Trois ans plus tard, son passé le rattrape sans
crier gare : un coup de fil lui annonce que sa petite
soeur Susie a disparu. Ni une ni deux, il s'en retourne
"au pays" pour essayer de la retrouver. Une
fois sur place, il s'aperçoit que la disparue
fricotait avec une sacrée bande de tordus...
Certains, en Suède, ont parlé de film
à la "Farrelly brothers". D'autres
ont carrément osé le "Pulp fiction"
suédois. C'est très exagéré.
A titre personnel, je parlerais plutôt d'un mélange
de Danny Boyle ("Une vie moins ordinaire"
notamment) et des frères Coen ("The big
Lebowski" pour le côté "cool
attitude" et "Fargo" pour le côté
"fantasia chez les ploucs"). Esthétiquement
parlant, beaucoup de grand angle, de caméra placée
au ras du plafond ou au ras du sol, d'accélérations,
de gros plans soudains... C'est loufoque et plutôt
réussi. On y retrouve Tuva Novotny (en écervelée
vaguement toxicomane), Kjell Bergqvist (vu dans "Den
bästa sommaren" puis "Tjenare Kungen"
du même Ulf Malmros ; son petit rôle de
flic déprimé pas très clair est
assez drôle), Malin Morgan (que Malmros a fait
jouer récemment dans "Tjenare Kungen")
et Michael Nyqvist (qui surjoue ici). |
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Tredje
vågen (Den) / La troisième vague (Anders
Nilsson, 2003) |
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Rebecca
Åkerström, jeune cadre expatriée en
Angleterre, s'aperçoit que son compagnon est
impliqué dans des affaires de criminalité
financière à l'échelle européenne.
Après une violente altercation avec lui, elle
décide de fuir. Elle part pour La Haye, y rencontre
le nouveau chef du service de police d'Europol (un compatriote
suédois), mais une équipe de tueurs à
gages leur tombe sur le dos. Fort heureusement, Johan
Falk — ancien superflic suédois —
passait justement dans les parages...
Il s'agit du dernier opus d'une série de trois
films relatant les aventures de Johan Falk (la série
a commencé avec "Tolérance zéro"
en 1999 et "Protection rapprochée"
en 2000). Ici, les cinéphiles qui cherchent le
dépaysement en Scandinavie seront déçus.
Ce thriller à "la suédoise"
nous emmène en Angleterre, aux Pays-Bas, au Luxembourg
et en Allemagne (quelques secondes se déroulent
même à Dunkerque), mais on ne voit quasiment
rien de la Suède. Du reste, on ne voit pas grand
chose, si ce n'est des couloirs et des chambres de môtels
/ hôtels, des bureaux et des intérieurs
de véhicules. En fait, on a là un film
policier estampillé "Union européenne"
où les personnages parlent à la fois anglais,
français, suédois et allemand ! Côté
scénario, aucune surprise, on nous propose une
synthèse de choses — plus ou moins vraisemblables
— vues mille fois ailleurs ; il arrive même
qu'on ait un peu d'avance sur ce qui passe à
l'écran. Côté réalisation
et jeu des comédiens, on est partagé :
on hésite entre le vrai film, le téléfilm
de luxe ou le téléfilm tout court. Sur
le plan formel, il est clair qu'on s'est efforcé
de la jouer "à l'américaine",
mais le film a du mal à se départir de
son "accent européen" et les moyens
semblent un peu courts (les scènes d'émeute
— à la fin — dans une rue "unique",
ça ne va pas bien loin). Le personnage de Johan
Falk a une gueule, une certaine carrure, mais il lui
manque la violence qu'on peut trouver chez un Jason
Bourne par exemple. Côté méchants,
le compagnon de Rebecca est assez inquiétant
dans un premier temps, mais le soufflet retombe assez
vite. Les comédiens "tueurs à gages",
eux, accomplissent leur tâche de façon
tantôt plan-plan, tantôt maladroite, et
le français approximatif qui leur sert pour communiquer
nuit parfois à leur crédibilité
(en leur conférant un côté "débutants
ânonnant leur texte"). Enfin, l'utilisation
massive du téléphone portable finit par
être aussi horripilante que dans la vraie vie...
L'ensemble se laisse voir sans déplaisir, mais
n'est que moyennement emballant. |
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Dag
och natt / Jour et nuit (Simon Staho, 2004) |
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De
nos jours, en Suède, Thomas n'en peut plus. Il
n'en peut plus d'être un amant, un père,
un fils, et il a décidé de se suicider.
Le temps d'une journée, il fait ses adieux à
diverses personnes de son entourage. Il croise également
la route d'un vieil homme et d'une jeune prostituée...
Si vous n'avez pas le moral, ce film n'est vraiment
pas pour vous. On l'a compris, le sujet — également
traité en 1963 dans "Le feu follet"
de Louis Malle — est particulièrement grave
et ce n'est vraiment pas la fête au village. Par
ailleurs, il faut savoir que toute l'histoire est filmée
de l'intérieur de la voiture du (anti-)héros,
en plans fixes. Pendant 1h27, la caméra nous
montre soit le siège conducteur, soit le siège
passager ; ce qui se passe en dehors du véhicule
n'est vu qu'au travers des vitres des portières.
Tout ceci pourrait paraître rebutant, mais il
n'en est rien. On suit cette descente aux enfers comme
un troisième passager "qui saurait"
mais qui ne pourrait rien dire, on guette la moindre
lueur d'espoir, c'est terrible. |
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Fröken
Sverige / Miss Suède (Tova Magnusson-Norling,
2004) |
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Moa,
jeune suédoise de Vänersborg, entre doucement
dans le monde des adultes. Elle s'ennuie à l'usine
et peine à s'affirmer au sein de sa bande d'amis
gauchistes. En proie au terrorisme intellectuel pratiqué
par les "fort(e)s en gueule", elle cherche
sa personnalité et tente de cultiver son petit
jardin intime. Surtout, elle aimerait bien trouver le
"bon" garçon. Est-ce que ce sera Conny,
le batteur du groupe de rock ? Andréas, le grand
garçon bon chic bon genre dont la tête
touche presque le plafond ? Jens, le cas social que
les parents de Moa aimeraient réconcilier avec
le genre humain ?
Dans la catégorie "film de djeunz",
vous avez aimé "Hannah med H" (de Christina
Olofson, 2003), essayez "Fröken Sverige".
Cela dit, ce dernier est un peu plus profond et nettement
plus réaliste que le premier, et, pour peu qu'on
soit client des films à la sauce "Qui suis-je,
où vais-je, dans quel état j'erre ?",
on passe un moment sympathique. Pour les connaisseurs,
ce sera même l'occasion de retrouver Alexandra
Dahlström, découverte dans "Sanning
eller konsekvens" (1997) puis dans "Fucking
Åmål" (1998). Ici, elle a 20 ans, elle
est coiffée à la diable et pas du tout
à son avantage. Son personnage de Moa n'en est
pas moins attachant. |
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Fyra
nyanser av brunt / Quatre nuances de brun (Tomas
Alfredson, 2004) |
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Dans
ce film, on nous raconte quatre histoires. On y suit
quatre pères suédois dans leur rapport
avec leur progéniture (ou plutôt "dans
le rapport que leur progéniture entretient avec
eux"). Il y a d'abord Sören, en Dalécarlie.
Il vient de mourir et ses fils se retrouvent à
ses funérailles. Il y a ensuite Jan-Erik, le
prestidigitateur. Au cours d'une tournée avec
sa femme, il va rendre visite à son fils Richard
qui tient un hôtel au bord de la mer. Puis vient
Christer, en Scanie. Il travaille dans un crématorium
pour animaux et se met un jour en tête de ramener
son adolescent de fils à de meilleurs sentiments
vis-à-vis de l'école et du travail. Enfin,
il y a Olle, à Göteborg. Il participe à
un cours de cuisine en petit comité (cours qui
s'est peu à peu transformé en groupe de
thérapie) et a récemment été
victime d'une agression en pleine rue...
On ne peut pas tellement en dire plus. Mais vous l'aurez
compris : c'est un film "Qui suis-je ? Où
vais-je ? Dans quel état j'erre ?" à
la puissance quinze. Il a été écrit
et interprété par la troupe du "Killinggänget",
sorte de "Nuls" ou de "Robins de bois"
à la suédoise. Sur la forme, ce n'est
pas à proprement parler un film à sketches
car les histoires sont imbriquées les unes dans
les autres. On peut ainsi passer de la première
à la deuxième, puis de la deuxième
à troisième, puis retourner à la
première, puis passer à la quatrième,
puis à la deuxième et ainsi de suite...
Sur le fond, les histoires sont d'un intérêt
inégal : la plus dérangeante est celle
de Christer, l'employé du crématorium.
La plus surprenante est celle de la thérapie
de groupe... L'ambiance générale est plutôt
à l'amertume, au désenchantement, mais
certaines scènes — empreintes d'un humour
assez noir — parviennent quand même à
faire rire. C'est une curiosité qui ne laisse
pas indifférent. |
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Masjävlar
/ Retour en Dalécarlie (Maria Blom, 2004) |
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Mia
Sundin, jeune cadre d'une trentaine d'années
installée à Stockholm s'en retourne en
Dalécarlie* pour fêter les 70 ans de son
père. C'est l'occasion de retrouver ses soeurs
Eivor et Gunilla, de revoir les anciens amis. Mais ce
qui ne devait être qu'un week-end en famille se
met très vite à tourner au "règlement
de comptes à Ok Corral"...
C'est un bien joli film, dans la veine d'"Un air
de famille" de Cédric Klapisch, à
ceci près qu'il se passe dans le centre de la
Suède, en hiver, dans une ambiance "violon
folk" qui évoque le Canada ou l'Alaska,
et qu'on s'y bouffe le nez en bougeant et en buvant
davantage (normal, il fait froid). Le personnage interprété
par Sofia Helin (charmante) est vraiment attachant.
La peinture des retrouvailles familiales offre quelques
moments bien pittoresques. Un peu de rire, un peu de
larmes, au bout des 1h30 de spectacle on a l'esprit
bien rassasié (plus qu'après le visionnage
de — par exemple — "Fyra veckor i juni"
d'Henry Meyer, 2005).
* Au centre du pays, à environ 290 km au nord-ouest
de Stockholm. |
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Populärmusik
från Vittula / Musique populaire de Vittula
(Reza Bagher, 2004) |
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Pajala,
dans le nord de la Suède (à la frontière
suéco-finlandaise), au début des années
60. Les jeunes Matti et Niila sont amis. Membres d'une
communauté de Suédois et de Finlandais
se sentant loin de tout, avec le sentiment d'être
de nulle-part, ils évoluent dans un monde où
les adultes trompent l'ennui en faisant des enfants,
en coupant du bois et en distillant de l'alcool, pendant
que les adolescents rêvent de Liverpool ou d'Elvis
devant des téléviseurs en noir & blanc.
Mais voilà qu'un jour un 45 tours de rock' n'roll
tombe entre les mains de Niila. A compter de cet instant,
plus rien ne sera comme avant...
Ce film est l'adaptation d'un roman de Mikael Niemis.
C'est une sorte de pendant suédois du "Péril
jeune" (Cédric Klapisch), mais certains
— peut-être — penseront davantage
au cinéma d'Emir Kusturica. Tout ce qui joue
sur la corde de la nostalgie emporte assez facilement
l'adhésion : l'école primaire, le collège,
les modes vestimentaires, les coupes de cheveux, les
vieilles voitures, les vieux autobus... Par ailleurs,
pour des spectateurs non scandinaves, l'exotisme joue
à plein. La confrontation des univers suédois
et finlandais offre quelques moments bien pittoresques...
Côté bémols, certains éléments
du scénario pourront paraître assez sybillins.
On pensera d'abord à l'arrière-plan culturel
laestadien (cette dimension religieuse est importante
pour expliquer ce qui se passe dans la tête de
Niila, dans celle de son terrible père), mais
aussi à certaines scènes comme celle du
passage de l'enfance à l'adolescence ou celle
de la "castration" de la grand-mère...
De même, était-il bien nécessaire
de céder à l'air du temps en laissant
planer un doute sur les orientations sexuelles de certains
personnages ? Quoi qu'il en soit, si certains —
en Suède — ont cru voir là une collection
de cartes postales au trait parfois caricatural, l'impression
globale est plutôt très favorable. |
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Rånarna
/ Les braqueurs (Peter Lindmark, 2004) |
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Klara
Arvidsson, jeune inspecteur de la police criminelle
à Stockholm, enquête sur une équipe
de braqueurs de banques à l'efficacité
toute militaire...
Si le film s'intitule "Les braqueurs", son
sujet principal n'en est pas moins la jeune inspectrice
et la façon douce, minutieuse et obstinée
dont elle mène son enquête tout en cherchant
à échapper à ses fantômes
intérieurs. On a donc là un film suédois
dont le héros est — comme souvent pourrait-on
croire — une héroïne (et l'on ne s'en
plaindra pas). Sur la forme, pas de réelles surprises
: le réalisateur nous sert un thriller "à
la hollywood" — tout en s'efforçant
de rester dans les limites d'un certain "naturalisme"
— en reprenant un tas de "trucs" vus
mille fois dans le cinéma d'outre-atlantique.
Sur le fond, rien de bien stupéfiant non plus.
En gros, on est à cheval entre le film et le
téléfilm, mais l'ensemble fonctionne et
l'on peut se laisser prendre par la main. D'aucuns ont
reproché à Sofia Helin de ne pas être
assez crédible (trop douce pour se mesurer aux
malfaiteurs surentraînés), mais baste !
c'est peut-être un des intérêts majeurs
de l'histoire. Faut-il absolument déborder de
testostérone pour être crédible
en femme-flic ? Au rayon des regrets, on ajoutera :
le scénario à coup de théâtre
(gênant pour les revisionnages du film) et la
relative maigreur de la bande son (les fusillades sont
loin d'être aussi pétéradantes que
dans un "Heat" de Michael Mann par exemple).
Bref, rien d'extraordinaire, rien de honteux non plus
; un honnête thriller suédois du vendredi
soir. |
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Fyra
veckor i juni / Quatre semaines en juin (Henry Meyer,
2005) |
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Parce
qu'elle a donné des coups de ciseaux à
son compagnon infidèle, Sandra est mise sous
probation et condamnée à l'éloignement.
Elle se retrouve dans une petite ville, à travailler
au tri de vêtements usagés pour une chaîne
de magasins appartenant à l'Armée du Salut,
et, dans l'immeuble en réfection où on
lui a trouvé un studio, elle finit par faire
la connaissance de Lilly, une vieille dame d'environ
70 ans qui vit dans le souvenir d'un amour de jeunesse.
Les jours passent, les deux voisines deviennent de plus
en plus intimes, les langues se délient, des
secrets refont surface. Au dehors, les murs retrouvent
doucement une seconde jeunesse. Au dedans, Sandra se
décrispe lentement et finit par se laisser approcher
par un des maçons polonais...
On l'aura compris, il s'agit là d'un film dans
la veine "Qui suis-je, où vais-je, dans
quel état j'erre ?". Rien de bien nouveau
sous les lambris, rien de déplaisant non plus
; et si les enjeux ne sont pas "considérables"
— on n'est pas là pour sauver le Monde
—, les amateurs y trouveront sûrement leur
compte (avec un supplément d'exotisme pour les
non-scandinaves). Il faut savoir aussi qu'il s'agit
du dernier film en date de Tuva Novotny-Hedström,
la jeune coqueluche du moment dans le cinéma
suédois. Ici, on la retrouve en "oiseau
blessé", en colère, piercing à
la narine, tatouage sur le bras, les pupilles cristallines.
Et l'on conviendra qu'elle ne laisse pas indifférent...
Au rayon des regrets, on avouera avoir eu du mal avec
l'image HDTV. Sa précision "métallique"
est assez déstabilisante au début, voire
déplaisante ; on n'a pas du tout l'impression
d'être au cinéma. Cela dit, plus le film
avance, moins on y prête attention. Il n'empêche
: la bonne vieille pellicule argentique, ça a
une autre "gueule". |
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Innan
frosten / Avant le gel (Kjell Åke Andersson,
2005) |
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Ce
film est une adaptation d'un roman noir d'Henning Mankel.
On y voit l'inspecteur Wallander*, en sevrage de whisky,
mener une enquête aux ramifications multiples
tout en essayant de recoller les pots cassés
avec sa grande fille toute fraîche émoulue
de l'école de police...
Côté enquête policière, tout
va plutôt très vite, les officiers de police
remontent les pistes avec une facilité stupéfiante,
ils sont toujours au bon endroit au bon moment, ils
ont toujours la bonne idée, la bonne intuition.
Quant aux méchants de service (une bande d'extrêmistes
religieux qui s'en prennent aux "pourrisseurs"
des valeurs chrétiennes), ils ont beau trucider
ici et là, on ne les sent pas très habités
par leur croisade. Bref, ça baigne en plein dans
"l'eau de boudin". Côté intimité
des personnages, c'est mieux, plus crédible,
sans pour autant atteindre des sommets shakespeariens
(au fond, tout va comme dans la petite vie du commun
des mortels). Bref, on est moins au cinéma qu'à
la télévision, et, si on était
méchants, on verrait presque un cousin scandinave
de l'inspecteur Derrick dans ce Kurt Wallander... On
peut regarder le film de deux façons : 1)
comme un spectateur suédois, et, dans ce cas,
on n'y verra rien de bien original ; 2) avec un regard
extérieur, mi-ethnologique mi-touristique, et
là, on y trouvera quelques petites choses à
glaner. Après tout, en matière de thriller,
on est habitué au cinéma américain,
au cinéma français, aux téléfims
allemands... pourquoi ne pas s'offrir une petite incursion
dans l'univers suédois ? Cependant, qu'on se
le dise : l'ensemble est très plan-plan et on
y évoque des problèmes de société
assez rebattus ces derniers temps ! Ce film pourrait
très bien passer un vendredi soir, sur Arte,
dans une version française déprimante...
Cela dit, au rayon des bons points, on retiendra surtout
la prestation attachante de Johanna Sällström**
qui fait carrément de l'ombre à tous ses
homologues masculins. Petite remarque anecdotique pour
finir : pour un film se passant dans le sud du pays,
les comédiens n'ont pas vraiment l'accent. Autrement
dit : on a là un film qui pourrait se passer
à Marseille mais où tout le monde parlerait
avec l'accent parisien ! |
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*
Rôle tenu précédemment par Rolf
Lassgård et repris ici par un autre comédien.
** Dernière minute : la jeune femme a été
retrouvée morte dans son appartement en février
2007. Elle était âgée de 32
ans ! |
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Kim
Novak badade aldrig i Genesarets sjö (Martin
Asphaug, 2005) |
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De
nos jours, Erik se rend aux funérailles de son
ami d'enfance Edmund. Des souvenirs reviennent à
sa mémoire. Notamment cette fin d'année
scolaire au début des années 1960, les
trois dernières semaines d'école passées
avec la ravissante remplaçante Ewa Kaludis et
les vacances d'été pendant lesquelles
les deux garçons furent confrontés à
un événement dramatique...
On l'aura compris, ce "Kim Novak ne s'est jamais
baignée dans le lac de Genezareth" est un
film jouant sur la corde de la nostalgie. La Suède
au début des années 60 : les vieilles
voitures, les coupes de cheveux, les grosses lunettes
modèle "sécurité sociale",
les tailles cintrées et les jupes bouffantes
des jeunes filles... sans oublier la voix off de "celui
qui se souvient" et les petites notes de piano
"à la Yann Tiersen". L'ensemble est
tout aussi convaincant qu'Helena af Sandeberg est charmante,
et l'on se dit qu'il est bien dommage que ce cinéma-là
soit tout bonnement ignoré sous nos latitudes. |
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Som
man bäddar... / Comme on fait son lit... (Maria
Essen, 2005) |
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en
préparation... |
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Tjenare
Kungen / God save the king (Ulf Malmros, 2005) |
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1984,
Abra, punkette de 19 ans, quitte sa campagne pour aller
chercher la gloire à Göteborg. Avec sa nouvelle
amie Millan et deux autres filles, elle fonde le groupe
de rock "Tjenare Kungen". On les suit dans
les petites galères du quotidien (le boulot,
les garçons, les petits concerts, les agents
artistiques plus ou moins "foireux"...) et
dans leur quête du fameux "quart d'heure
de célébrité"...
Sous des dehors de film pour ados, on tient là
un spectacle qui devrait beaucoup plaire aux quarantenaires
qui — à l'image du réalisateur —
ont eu 20 ans au début des années 1980.
Bienvenue à l'époque du jean / chaussettes
blanches, des tenues pastel, des coupes de cheveux ringardes.
Bienvenue aussi à l'époque des walkmans
volumineux, du synthé mis à toutes les
sauces, des boutiques de disques où l'on vendait
encore des vinyles, des cabines téléphoniques
(eh oui, les gens n'avaient pas encore la monomanie
du téléphone mobile à cette époque)...
Difficile de ne pas sourire ou de ne pas ricaner en
revoyant tout cela. Difficile, également, de
ne pas éprouver un peu de vague à l'âme
en repensant à l'énergie perdue de ces
jeunes années... Le couple formé par Josefin
Neldén & Cecilia Wallin — nées
toutes deux à l'époque où l'histoire
est censée se passer — tient vraiment bien
la route, et, pour peu que l'on ne soit pas résolument
allergique au punk rock, les 90 minutes de film passent
gentiment. Le film est frais, sans enjeu particulier,
il nous propose une balade nostalgique "sympatoche". |
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Du
& jag / Toi & moi (Martin Jern & Emil
Larsson, 2006) |
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De
nos jours, dans le sud de la Suède, Niklas Andersson
et Maja Hovendahl — qui se sont perdus de vue
depuis cinq ans — se rendent séparément
à une soirée de départ organisée
par une amie commune. Là, au milieu des invités,
ils ont la surprise de se retrouver l'un en face de
l'autre. Regards, échange de banalités,
malaise... on comprend bien vite que de vieilles blessures
ne vont pas tarder à se rouvrir.
Ce deuxième long métrage de l'équipe
Martin Jern / Emil Larsson est une nouvelle variation
du thème "Qui suis-je ? où vais-je
? dans quel état j'erre ?" Ici, cela concerne
un petit groupe de prétrentenaires. Pendant 85
minutes, on les suit entre la Suède et Copenhague,
d'une soirée à l'autre, d'une saison à
l'autre, d'une année à l'autre. Ça
picole à tout va — où qu'ils soient,
ces garçons et ces filles ont toujours un verre,
une bouteille ou une canette à la main ; c'est
hallucinant —, ça sort entre copines, ça
fait du skateboard entre mecs, ça se déhanche
sur de la musique de "djeunz" vraiment-trop-cool,
ça finit parfois en cellule de dégrisement...
Côté romance, le récit est suivi
à la fois du point de vue du garçon et
du point de vue de la fille, et c'est heureux. Il faut
dire que — très honnêtement —
les états d'âme du jeune Niklas ne passionnent
pas d'emblée, et que, face à ses atermoiements
presque aussi énervants que ceux du Gaspard de
"Conte d'été" (Eric Rohmer,
1996), il s'en faut de peu que le spectateur ne finisse
par l'envoyer à tous les diables. C'est donc
grâce aux personnages féminins —
Maja et Josefin — que l'on prend notre mal en
patience. Au bout du compte, on obtient une histoire
d'amour cousue de fil blanc, faisant la part belle au
mythe de la prédestination amoureuse, mais relativement
attachante. Côté distribution, on signalera
notamment la présence de Noomi Rapace qui trouve
ici son premier grand rôle au cinéma et
qui, parfois, a de sacrés airs de ressemblance
avec sa consoeur Tuva Novotny. On signalera aussi l'élimination
au montage de plusieurs personnages, dont un tenu par
Joel Kinnaman. |
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Snapphanar
/ La révolte des Chenapans (Måns Mårlind
& Björn Stein, 2006) |
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1678,
en Scanie, on suit la dernière partie du soulèvement
paysan pro-danois des "Chenapans". On y voit
comment le jeune Nils Geting décide de rejoindre
la rebellion pour venger sa famille massacrée
par des reîtres à la solde du roi de Suède...
Le soulèvement des Chenapans (1675-1679), voilà
un épisode historique largement méconnu
par chez nous. Seulement, si vous êtes amateurs
de films à costumes un tant soit peu "sérieux",
vous pouvez passer votre chemin et fuir à toutes
jambes. De fait, cette version "long métrage"
d'une série de films réalisés pour
la télévision est du niveau de certaines
productions "très grand public" réalisées
chez nous pour le compte de TF1 : c'est tape-à-l'oeil
et complètement bidon ! Les répliques
sont d'une grande indigence (les personnages n'ont pas
grand chose à dire et se contentent de nous expliquer
ce qu'ils font ou ce qu'ils vont faire), les scènes
d'action sont plutôt très "cheap"
(à cet égard, le premier duel de Malin
Morgan fait froid dans le dos ; l'espace d'un moment,
on frémit même à l'idée de
la voir se lancer dans un "kung-fu fighting"
des plus pathétiques) et les invraisemblances
se ramassent à la pelle. Par ailleurs, voir tous
ces comédiens débiter leur texte en s'appliquant
à bien prendre l'accent scanien (aux sonorités
franchement rurales et involontairement comiques)...
misère de misère ! Côté distribution,
Tuva Novotny et Anders Ekborg ont l'air de cachetonner
tranquillement ; Malin Morgan est très souvent
ridicule ; André Sjöberg et Gustaf Skarsgård
sont bien falots ; quant à la figuration, sa
prestation est le plus souvent du niveau d'un spectacle
de patronage... Pendant les 2h39 que dure le film, on
se dit souvent : "Mais que diable allaient-ils
faire dans cette galère ?" |
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Varannan
vecka / Une semaine sur deux (Felix Herngren, Måns
Herngren, Hannes Holm..., 2006) |
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Pontus,
jeune père divorcé à l'aise dans
ses baskets, vit tranquillement dans la routine de son
boulot de réalisateur de films publicitaires.
Mais voilà qu'un jour le couple de son frère
Jens se met à battre de l'aile...
Ils se sont mis à quatre pour réaliser
cet énième opus de "Qui suis-je,
où vais-je, dans quel état j'erre ?"
et l'on se demande bien pourquoi. La jaquette parle
d'une "comédie chaleureuse sur des relations
glaciales", or, en réalité, on nous
sert à nouveau une sorte de best of d'émissions
de débats psycho-socio-cul un peu rasoir dans
lequel on communique énormément par téléphone
portable interposé ! (on ne nous épargne
rien, même pas le plan parfaitement gratuit des
deux mecs qui s'embrassent sur la bouche) Bref, sans
être vraiment déplaisant, ce film est quand
même un peu vain. Et, en dehors de deux trois
faux films publicitaires rigolos (l'un d'eux est même
assez "impressionnant"), il ne parvient à
nous arracher que quelques sourires polis. Déception
donc. |
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Arn
tempelriddaren / Arn, chevalier du Temple (Peter
Flinth, 2007) |
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En
Suède, à la fin des années 1160,
Arn Magnusson (fils de seigneur, éduqué
par des moines) et Cecilia Algotsdotter (également
fille de seigneur) s'aiment. Hélas, leurs familles
respectives n'ont pas les mêmes opinions politiques.
La famille d'Arn est du côté de la lignée
d'Erik Jedvardsson (roi des Svear assassiné en
1160) et celle de Cecilia est du côté des
partisans de Karl Sverkersson (élu roi par les
Östgötar puis assassiné en 1167). Pour
couper court à cette idylle, le garçon
est expédié en Terre Sainte où
il combattra dans l'ordre des Templiers, et la jeune
femme est enfermée dans l'abbaye cistercienne
de Gudhem. Les années passent. Arn combat glorieusement
tout en sachant se faire respecter par ses ennemis,
pendant que Cecilia ronge son frein derrière
les murs de son couvent. Quand Knut Eriksson —
fils d'Erik Jedvardsson — finit par revenir aux
affaires, l'horizon des deux amants semble s'éclaircir.
Seulement, la route est longue de la Terre sainte à
la Suède...
C'est peu de dire que l'histoire de la Suède
au 12ème siècle n'a pas souvent été
montrée au cinéma. On tient donc là,
une vraie curiosité. Côté atouts,
on a une reconstitution soignée, il y a du monde
à l'écran et l'on voit des choses jamais
vues jusqu'ici (on assiste notamment à la réunion
d'un allting à Axevalla). Même si les moyens
ne sont pas ceux de "Kingdom of Heaven" (2005)
— dans "Arn Tempelriddaren", Joakim
Nätterqvist tient pratiquement le rôle d'Orlando
Bloom dans le film de Ridley Scott
— l'ensemble est plus qu'honnête. S'il y
avait des reproches à faire, on dirait que le
film pèche d'abord par une relative sécheresse
des dialogues. De fait, les personnages n'ont pas beaucoup
de choses passionnantes à dire et la moyenne
des phrases par individu est assez faible. Ensuite,
il faut bien avouer que — dans la première
heure — Sofia Helin est un peu limite dans son
numéro estampillé "Petite maison
dans la prairie", avec le sourire ultra-brite et
la crinière blonde façon pub-pour-shampooing-Timotei.
De même, comment ne pas ricaner lorsqu'on voit
notre héros suédois dépeint comme
l'artisan de la victoire de Montgisard, en novembre
1177, contre Saladin ? Enfin, en dehors des scènes
hivernales, on conviendra que le réalisateur
nous propose l'image d'une nature médiévale
un peu trop "propre sur elle". Il est difficile
de ne pas songer que les paysages sont un peu trop "civilisés"
pour être honnêtes (sans compter que le
directeur de la photographie n'y est pas allé
de main morte avec les projecteurs ; l'image est très
très très éclairée !). S'il
n'était pas possible d'aller filmer dans la taïga
(l'histoire se déroulant dans la partie méridionale
du pays), le fait est que la campagne suédoise
qu'on nous montre à l'écran manque quelque
peu d'âpreté et de sauvagerie. Si l'on
était méchant, on ajouterait qu'on a parfois
l'impression que le film a été tourné
dans un éco-musée ou sur un terrain de
golf ! De ce point de vue, le voyage dans le temps est
nettement plus convaincant dans "La Source"
de Bergman (1960)... Bref, il s'agit d'un produit de
"grande consommation" avec une simplicité
d'image d'Epinal, mais, on le répète,
le résultat n'est pas mal du tout (on est loin
du calamiteux "Révolte des Chenapans"
de 2006). Incidemment, on signalera la présence
de Bibi Andersson dans la distribution. Elle tient un
petit rôle d'Abbesse cistercienne bien antipathique,
et, dans son costume de religieuse, elle est tout bonnement
méconnaissable. Le comédien français
Vincent Pérez fait également une apparition
dans le rôle d'un moine-soldat (il prononce même
trois mots en suédois). |
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Darling
(Johan Kling, 2007) |
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A
Stockholm, dans le beau quartier d'Östermalm, la
jeune Eva traîne son ennui dans les boutiques
de mode, dans les bars pour gens comme il faut. Elle
mène une vie facile de quasi rentière,
sans avoir à se soucier du lendemain. Parallèlement,
dans une autre partie de la ville, Bernard, ingénieur
au chômage de 61 ans, cherche du travail pour
finir de payer les traites de sa maison. Normalement,
leurs routes ne devraient pas se croiser. Seulement
voilà... les scénaristes sont tapis dans
l'ombre et ils décident de couper brutalement
les vivres à la belle Eva !
On pourra prendre cette histoire de "pauvre petite
fille riche plongée dans l'adversité"
de deux manières : en levant les yeux au plafond
tout en exhalant un gros soupir... ou en jouant le jeu.
Dans le premier cas, les occasions de ricaner seront
nombreuses. Dans le second, on passera un bon moment.
De fait, ce film — qui a obtenu le prix du meilleur
film nordique en 2007 ainsi que deux "Scarabées
d'or" en 2008 pour le meilleur premier rôle
masculin et la meilleure photographie — n'est
pas dénué de charme. Il a même une
certaine classe, un côté "cinéma
de papier glacé". La relation qui se noue
entre Eva et Bernard finit par être rééllement
touchante et la conclusion du récit — sans
concession — ne va pas sans coller des frissons.
Sous des dehors peu engageants, ce film est véritablement
une bonne surprise. |
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Kid
Svensk (Nanna Huolman, 2007) |
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Été
1984, à Göteborg. Du haut de ses 12 ans,
la jeune Kirsi Ruotsalainen vit mal le fait d'avoir
des origines finlandaises. Elle se fait appeler "Kid
Svensk" et mène une guérilla de chaque
instant contre sa mère qui lui fait honte parce
qu'elle n'a jamais fait l'effort d'apprendre le suédois.
Quand cette dernière décide d'aller passer
les vacances "au pays", l'ambiance devient
lourde, très lourde...
De la difficulté d'être immigré,
ou d'origine immigrée, avec des cheveux blonds...
A travers cette nouvelle histoire d'adolescence au féminin,
Nanna Huolman — qui nous raconte un moment de
sa jeunesse — nous montre combien le déracinement
peut être difficile à vivre, même
lorsque l'on est membre d'une minorité invisible.
On pourrait craindre le pire, s'attendre à un
récit dégoulinant de bons sentiments,
mais, par bonheur, l'héroïne est une véritable
tête à claques et son mal-être est
abordé au moyen d'un humour grinçant assez
jubilatoire (cela dit, il faut avoir connu la Suède
pendant les années 80 pour en goûter toutes
les saveurs). Enfin, quand l'émotion finit par
faire surface — mention spéciale à
la jolie scène aquatique de la dernière
partie du film, avec son liquide amniotique, son cordon
ombilical... — on n'a pas le sentiment de s'être
fait rouler dans la farine. Disons-le tout net, ce voyage
en Carélie, à la fois drôle et émouvant,
est une jolie surprise. |
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Linas
kvällsbok / Le journal intime de Lina (Hella
Joof, 2007) |
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Quand
Lina Berglund — jeune suédoise de 15 ans
— fait le bilan de sa vie, ce n'est pas bien brillant
: elle se pense inintéressante, immature, innocente,
indésirable. Elle se dit que quelque chose va
bien finir par arriver, qu'elle ne va quand même
pas mourir vierge ! Mais ses copines Thea et Caro sont
là qui veillent au grain. Il y a aussi Danne,
le lycéen hockeyeur qui rôde dans les parages,
et le jeune Ivar, aperçu un beau jour à
la cafetéria. A n'en pas douter, il y a de la
sortie de chrysalide dans l'air...
L'adolescence et l'éveil des sens, au féminin,
de nos jours en Suède. A prendre ou à
laisser ? Pour nous, cela sera "à prendre",
car, tout compte fait, ce film est bien sympathique.
Il doit beaucoup à la jeune comédienne
(franco-suédoise) qui tient le rôle titre
et qui emporte la sympathie du spectateur par sa douceur
juvénile. Bien sûr, ça parle djeunz
à tous les étages, ça boit sec,
ça vomit allègrement, ça pratique
l'onanisme sous la couette, mais sans vulgarité
(c'est un film romantique, on n'est pas du tout dans
"American Pie"). Pour le non-scandinave, cette
peinture de la jeunesse suédoise en 2007 constitue
une vraie curiosité (sur ce plan, l'Europe n'a
pas encore tout uniformisé). Incidemment, à
qui s'adresse vraiment ce film : aux ados ou aux adultes
? |
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Nina
Frisk (Maria Blom, 2007) |
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Nina
Frisk, environ 35 ans, vit sa vie d'hôtesse de
l'air avec un certain bonheur. Seulement, elle ne peut
pas passer son temps dans les nuages, il faut aussi
redescendre sur terre, se coltiner les névroses
de sa mère, de son frère, de son beau-père,
et affronter les frustrations du célibat. Et
puis, un jour, elle croise la route de Marcus, jeune
veuf père d'un petit garçon...
Il suffit de lire les lignes qui précèdent
pour se dire : "Bigre, quel scénario original
!" Et il suffirait de ne pas percevoir le 2ème
degré évident de l'affiche pour ne pas
avoir envie d'aller plus loin. En fait, ce deuxième
long métrage de Maria Blom (auteur d'une dizaine
de pièces de théâtre et, surtout,
réalisatrice du très sympathique "Masjävlar
/ Retour en Dalécarlie") mérite sans
doute qu'on aille au-delà des apparences. Bien
sûr, il ne fera pas date dans l'Histoire du 7ème
Art, mais, pour qui a aimé "Retour en Dalécarlie"
(dont "Nina Frisk" est en quelque sorte la
version urbaine), cette énième variation
du "qui suis-je, où vais-je, dans quel état
j'erre ?" peut plaire. D'autant qu'on a le plaisir
d'y retrouver la charmante Sofia Helin. |
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Solstorm
/ Tempête solaire (Leif Lindblom, 2007) |
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A
Stockholm, un soir de réception, la jeune avocate
Rebecka Martinsson reçoit un coup de fil de Sanna
Strandgård, son amie d'enfance. Celle-ci vient
de trouver le cadavre mutilé de son frère
— jeune prédicateur dans une communauté
religieuse libre de Kiruna — et elle la supplie
de venir à son secours. Ni une ni deux, Rebecka
prend l'avion. Une fois sur place, elle se voit bientôt
contrainte de mener l'enquête (car les soupçons
de la police se portent très vite sur Sanna),
mais tout le monde ne voit pas cela d'un très
bon oeil...
Un film avec Izabella Scorupco, comédienne suédoise
d'origine polonaise (certains se rappelleront peut-être
de ses prestations de James Bond girl dans "Golden
Eye", d'alpiniste dans "Vertical Limit",
ou de chasseuse de dragon dans "The reign of fire"),
cela semblait prometteur. Pourtant, tout compte fait,
on ne peut s'empêcher de rester sur sa faim. De
fait, ce thriller est assez mou et les quelques moments
de tension ne parviennent jamais à exciter vraiment
l'adrénaline des spectateurs. Les scénaristes
ont beau tenter de brouiller les pistes, rien n'y fait
: on suit l'ensemble d'un oeil atone, sans trembler,
sans redouter le pire. Et, même si la fin réserve
une petite surprise, on ne retient vraiment que deux
choses de tout cela : une peinture convenue de l'hystérie
et des manipulations dans certains groupes religieux,
et, surtout, la jolie balade dans les paysages enneigés
de la commune de Kiruna. |
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Maria
Larssons eviga ögonblick / Les instants éternels
de Maria Larsson (Jan Troell, 2008) |
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Une
voix de femme se souvient, nous ramène au début
du siècle dernier et nous parle de ses parents...
Elle nous raconte comment sa mère — Maria
— avait gagné un appareil photo au cours
d'une tombola. Comment son père — Sigge
— avait voulu le garder pour lui sous prétexte
qu'il avait payé le billet. Comment — enfin
— la jeune femme lui avait répondu que
s'il voulait sa part du gain, il n'avait qu'à
l'épouser. Ce qu'il avait fini par faire... Après
quoi, pendant les deux heures et sept minutes que dure
le film, la caméra nous invite à découvrir
quelques moments importants de la vie du couple. De
1907 jusqu'à l'entre-deux-guerres, on voit ce
qu'était le quotidien d'une famille ouvrière
de Malmö. On voit le père s'échiner
à gagner l'argent du ménage en exerçant
toutes sortes de boulots. On voit la mère élever
une troupe d'enfants de plus en plus nombreuse, brosser
des parquets et arrondir les fins de mois en se faisant
couturière... L'espace d'un instant, on pense
à Zola (à Gervaise notamment), mais, même
si la femme doit supporter en plus l'ivrognerie, les
infidélités et les coups de sang de son
homme, cela ne va jamais aussi loin ; la famille parvient
toujours à s'en sortir, à rester digne.
Et puis, un jour, en faisant du rangement, Maria Larsson
retrouve le fameux appareil photo. Elle pense d'abord
à en tirer un peu d'argent, mais l'artisan photographe
du coin — improbable Pygmalion — lui fait
comprendre que cet objet pourrait lui apporter bien
plus... A ce moment-là, on voit comment —
grâce à quelques plaques photographiques
— une humble fille du peuple se met à porter
un regard différent sur le monde qui l'entoure,
et comment, peu à peu, elle s'engage sur la voie
d'une certaine émancipation...
D'une manière globale, ce nouveau film "en
costumes" de Jan Troell — qui s'inspire de
faits réels — déborde de bons sentiments
et l'on a plus souvent l'impression de contempler des
aquarelles de Carl Larsson (1853-1919) que d'assister
à un spectacle néoréaliste ou à
un "kitchen sink drama". Qu'à cela
ne tienne : le résultat n'en est pas moins plaisant,
joliment filmé, et le jeu sensible de son interprète
principale lui confère une belle intensité.
Incidemment, en regardant le petit documentaire consacré
à la vraie Maria Larsson, on est surpris par
la justesse du choix des comédiens. De fait,
Maria Heiskanen et Mikael Persbrandt sont assez proches
— physiquement parlant — des véritables
Maria et Sigge. Enfin, signalons qu'en 2009 ce film
a été récompensé —
entre autres — par le "scarabée d'or"
(l'équivalent suédois des Oscar ou des
César) du meilleur long métrage de l'année. |
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Ofrivilliga
(De) / Happy Sweden (Ruben Östlund, 2008) |
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De
nos jours, en Suède, on suit cinq histoires.
Celle de Villmar qui se blesse à l'oeil pendant
une fête d'anniversaire et qui refuse d'aller
aux urgences. Celle de Linnea et Sara — deux ados
délurées — dont la virée
nocturne en bande manque de mal tourner. Celle de Lola,
une jeune enseignante idéaliste qui ne supporte
pas le désabusement de ses collègues et
qui entre en conflit avec eux. Celle d'un chauffeur
d'autocar décidant de bloquer son véhicule
tant que celui des passagers qui a abîmé
les rideaux des cabinets ne se sera pas dénoncé.
Enfin, celle d'Olle, un jeune homme supportant difficilement
les débordements salaces de vieux copains avec
lesquels il s'est offert un week-end de beuveries...
Ce film étonnant nous invite à une petite
réflexion sur les effets indésirables
de l'instinct grégaire. On y voit comment —
pour ne pas être montrés du doigt, pour
ne pas se retrouver en position de lâcheurs ou
d'exclus — des individus soucieux d'appartenir
"au groupe" sont amenés à faire
des compromissions, à dissimuler la vérité,
à se laisser humilier, voire à mettre
en danger leur vie ou celle d'autrui... Sur le plan
formel, c'est assez particulier. C'est filmé
en plans fixes, un peu à la manière d'une
caméra de surveillance. Les images sont souvent
décadrées et il arrive aux personnages
qui parlent d'être hors-champ, ou bien décapités,
ou bien très loin (au début du film, le
réalisateur ne nous montre que leurs pieds).
C'est un film qui montre des choses — certes —
mais qui donne aussi beaucoup "à entendre".
C'est un film "à écouter". On
retiendra tout particulièrement deux passages
: la scène de classe où une élève
cobaye se voit plongée dans l'embarras face à
l'attitude de ses camarades (à elle seule, cette
scène résume le film ) et la scène
de l'autobus où Linnea et Sara — déjà
bien alcoolisées — s'en prennent à
un paisible voyageur... Incidemment, le titre français
"Happy Sweden" — cédant à
cette mode exaspérante du titre "en anglais"
— témoigne d'un manque d'imagination crasse
(littéralement, "De ofrivilliga" signifie
"Les involontaires", il désigne les
individus qui agissent "bon gré, mal gré",
à leur corps défendant).
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Rallybrudar
/ Rallyes en jupons (Lena Koppel, 2008) |
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Dans
le nord du Värmland, au milieu des années
1960, Ulla Nilsson — assistante vétérinaire
— a la passion du volant. Elle va de ferme en
ferme — pour inséminer les vaches —
en roulant à tombeau ouvert, elle se mesure aux
loulous du coin dans des "street races" et
ne rêve que d'une chose : participer à
un rallye. Un jour, l'occasion s'offre à elle
de réaliser son rêve. Problème :
elle doit trouver un ou une co-pilote...
Avec cette nouvelle variation du thème "nous,
les Suédoises, on en a dans le pantalon ; attention
les gars, planquez vos miches !", la réalisatrice
Lena Koppel nous livre un film sympatoche. Un film jouant
sur la corde de la nostalgie, avec, en vedettes, tout
un ensemble d'automobiles "vintage", et, en
arrière-plan, une petite évocation du
long combat pour l'émancipation des femmes. Eva
Röse a une niaque communicative, les sourires et
les airs ahuris de Marie Robertson sont attendrissants,
et l'ambiance des glorieuses sixties est plutôt
bien rendue. On regrettera simplement, la relative timidité
des prises de vue pendant les scènes de rallye.
On a bien quelques plans réjouissants filmés
en caméra embarquée (bien utilisés
dans la bande annonce), mais, d'une manière générale,
cela reste convenu, plus "télévisuel"
que véritablement "cinématographique".
Sans verser dans le "Fast and furious", il
y avait sûrement moyen de secouer davantage le
spectateur. Quoi qu'il en soit, on le répète,
cette histoire de jeunes femmes des années 60
s'unissant pour aller jusqu'au bout de leur rêve
est très sympathique et vaut bien plus que son
titre et son affiche de joyeux nanar. |
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Bröllopsfotografen
/ Le photographe de mariage (Ulf Malmros, 2009) |
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De
nos jours, dans un coin paumé du Värmland,
Robin Johansson mène une vie au ralenti de jeune
homme de 29 ans habitant toujours chez ses parents.
En semaine, il travaille sans conviction dans l'usine
de sulfate locale qui empuantit l'atmosphère,
et, le reste du temps, il tourne en rond dans un patelin
quasi désert, pousse fréquemment jusqu'à
la forêt toute proche et se divertit en prenant
des photos, des tas de photos qu'il va ensuite imprimer
dans le sous-sol qui lui sert de chambre... Alors que
rien ne semblait devoir troubler cette existence morne,
voilà qu'une occasion inespérée
d'échapper à la routine finit par lui
tomber du ciel. Il fait aussitôt son baluchon,
emprunte la voiture paternelle et part pour Stockholm
où — il en est sûr — une carrière
de photographe l'attend...
Depuis 1992, Ulf Malmros (né en 1965) a réalisé
six longs métrages et a su se faire une jolie
réputation de réalisateur de comédies
plus ou moins "déjantées" (notamment
depuis "Smala Sussie" en 2003). Avec ce "Bröllopsfotografen",
tout nouveau, tout frais, on retrouve une bonne partie
des ingrédients qui ont fait son succès.
Il y a d'abord la petite troupe de comédiens
dont il a fini par s'entourer — Björn Starrin,
Tuva Novotny et Kjell Bergqvist en tête —,
puis le style, la façon de filmer. Enfin, on
reconnaît ici et là des lieux de tournage
qu'il a déjà exploités (en particulier
dans "Tjenare Kungen"). Côté
scénario, on est encore en terrain connu, car
il y a une certaine parenté entre les aventures
de Robin Johansson et celles vécues — au
féminin — par le personnage d'Abra dans
"Tjenare Kungen" (2005). De fait, on est de
nouveau confronté à un personnage quittant
sa campagne pour aller réaliser son rêve
dans la grande ville, un personnage ne reculant devant
aucune compromission, aucun mensonge pour parvenir à
ses fins ; une sorte de Rastignac en somme. Mais un
Rastignac "soft", car s'il taille sa route
en marchant droit, en faisant fi des obstacles, c'est
avec une certaine candeur, et c'est toujours au détriment
de gens vraiment mesquins, eux... Côté
comédie, c'est assez réussi, même
s'il faut avoir une certaine familiarité avec
l'univers du réalisateur pour en goûter
toutes les saveurs (il est particulièrement amusant,
par exemple, de retrouver dans le couple de jeunes mariés
ceux qui furent — neuf ans plus tôt —
les deux enfants héros du film "Den bästa
sommaren"). On sera plus réservé
sur la partie "lutte des classes" du scénario
où le trait se fait plus épais et où
l'on donne plus facilement dans le cliché...
Björn Starrin — l'apprenti cinéaste
barré de "Smala Sussie" — rend
son personnage attachant. Tuva Novotny, un peu sous-employée,
rayonne d'un charme discret. Kjell Bergqvist nous sert
un bon numéro de clown blanc. Entre deux plans
séquences "grand angle" filmés
au steadicam, entre deux balades dans un Stockholm inondé
de soleil, on s'amuse aussi à retrouver Johannes
Brost (qui s'est pris un sacré coup de vieux
depuis — disons — "Black Jack"),
la jeune Johanna Strömberg (impayable Gloria dans
"Tjenare Kungen"), Lotta Telje (l'employée
de maison de retraite de "Smala Sussie"),
Johan Andersson (le bassiste-slappeur de "Tjenare
Kungen", le suicidé raté de "Smala
Sussie"). Enfin, Michael Nyqvist — révélé
au public français depuis sa prestation dans
"Millenium" — s'est même fendu
d'un caméo. |
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Mañana
(Manuel Concha, 2009) |
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De
nos jours, à Malmö, le jeune Marco
coule des jours paisibles et prend la vie comme
elle vient. Il habite encore chez ses parents,
gagne sa vie en travaillant dans une maison
de retraite, et s'offre des moments sympas avec
son vieux copain Mattias. Problème :
aucune fille n'a jamais posé les yeux
sur lui et il n'a pas encore trouvé le
moyen de combler cette lacune...
Il suffit de lire ces quelques lignes pour penser
"bigre, quelle histoire !" Mais, vous
l'aurez peut-être deviné, cette
accroche scénaristique légère
comme une plume d'eider n'est qu'un prétexte.
Il suffit de préciser que Marco est d'origine
chilienne pour comprendre qu'à travers
ce portrait d'un jeune homme en quête
d'amour, le réalisateur — né
lui-même à Malmö en 1980 —
se propose de donner un petit coup de projecteur
sur ce que peut être la vie de Suédois
issus de l'immigration à la fin des années
2000. Au terme des 80 minutes de film, sa conclusion
est simple : "la Suède change*,
surmontons ce qui nous sépare et bâtissons
des ponts pour relier les hommes" (voir
le dernier plan du film). Bien sûr, le
récit n'évite pas la carricature
(ceux qui s'accommodent du changement sont évidemment
très gentils ; ceux qui s'en attristent
sont évidemment très méchants),
il n'est pas non plus sans maladresses (à
cet égard, les histoires de couple de
Mattias viennent vraiment comme un cheveu sur
la soupe), mais il a le mérite de ne
pas verser totalement dans l'angélisme.
La réalisation dépasse rarement
le niveau d'un téléfilm, mais
l'ensemble se laisse regarder.
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*
De fait, les flux migratoires vers la Suède
— restés longtemps négligeables,
ou limités aux pays voisins — connaissent
un accroissement significatif depuis les années
1990. |
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