Kino
Digital : Cinéma nordique |
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Ici,
on vous invite à survoler en quelques pages les
notules "critiques" présentes sur certains
tests dvd de la rubrique "Cinéma nordique"
de Kino Digital. Les films — inédits en
France — sont classés par années
de sortie. Dans une même année, le classement
est fait par ordre alphabétique de titres originaux.
Vous trouverez essentiellement des films suédois,
mais aussi quelques titres norvégiens, danois,
islandais et finlandais. Bien sûr, les avis exprimés
ici n'engagent que le ouebmestre du site. |
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Snabba
cash / L'argent facile (Daniél Espinosa,
2010) |
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De
nos jours, en Suède, Johan Westlund — alias
JW — est un garçon de la classe moyenne
qui mène plusieurs vies de front : étudiant
dans une école de commerce, il passe une partie
de son temps libre à frayer avec la jeunesse
huppée de Stockholm et s'acoquine de temps en
temps avec des gens beaucoup moins fréquentables
pour gagner l'argent qui lui permet de jouer au fils
de bonne famille. Un jour, alors qu'on lui a demandé
de faire le taxi pour Jorge Salinas — un immigré
latino-américain récemment évadé
de prison —, il franchit la limite à ne
pas dépasser et finit par basculer dans le monde
du crime organisé...
Ce qui précède est une façon parmi
d'autres de présenter le film. On pourrait tout
aussi bien voir les choses du côté de Jorge
Salinas ou du côté du gangster serbe —
Mrado — qui lui court après. Mais le fait
est que JW est bien le fil conducteur de l'histoire...
Une histoire d'Icare suédois se brûlant
les ailes pour avoir trop voulu s'approcher du soleil.
Une histoire jetant aussi "un" regard sur
ce que devient la Suède à l'ère
de la mondialisation : développement des flux
migratoires — dans ce film, la plupart des personnages
sont latinos, serbes, arabes... on entend aussi parler
d'Albanais —, implantation de groupes mafieux,
trafics en tout genre, blanchiment d'argent, guerre
des gangs, toutes choses vraiment très éloignées
de l'univers aseptisé de Carl Larsson, d'Abba,
de Björn Borg ou d'IKEA, toutes choses que l'on
voit peu dans les films suédois contemporains*,
toutes choses — enfin — qui ne plairont
pas à tous les publics (par sa façon de
mettre le doigt sur certaines réalités,
le film prête énormément le flanc
aux accusations de xénophobie)... Par certains
aspects — les histoires suivies en parallèle,
la préparation du "coup", les ambiances
gris-bleu —, "Snabba Cash" fait un peu
penser au "Heat" de Michael Mann (1995), mais
de très très loin. Le récit n'évite
pas les clichés (si les méchants sont
si méchants, c'est qu'on les a battus quand ils
étaient enfants), la caméra à l'épaule
fiche souvent le mal de mer et certains flashforward
sont assez déconcertants. Côté comédiens,
Joel Kinnaman nous re-sert une partition déjà
jouée auparavant (voir par exemple "I skuggan
av värmen" en 2009) et se fait un peu voler
la vedette par Matias Padin et Dragomir Mrsic. Enfin,
les scènes avec la petite Lea Stojanov —
qui interprète Lovisa, la fille de Mrado —
sont assez crapuleuses. Il n'empêche, l'ensemble
tient plutôt bien la route et se suit sans déplaisir.
On raconte même que les messieurs d'Hollywood
— avec leur manie exaspérante du recyclage
à but très lucratif — penseraient
à en faire un remake. En bref : pas si mal, mais
fera grincer des dents. |
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*
signe des temps, le thème des crispations
dans la société suédoise
face à ces changements est également
évoqués dans le film "För
kärleken" (par le réalisateur
d'origine ougandaise Othman Karim, 2010), avec
Tuva Novotny, Peter Gardiner et Danny Glover. |
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Svinalängorna
/ Le dépotoir / Beyond (Pernilla August,
2010) |
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Un
matin de décembre, dans un appartement du centre
de la Suède, Leena et Johan se réveillent
doucement. Ils sont bientôt rejoints par leurs
deux filles — Marja et Felicia — et toute
la famille s'offre un moment agréable devant
un petit déjeuner de la Sainte-Lucie. Mais voilà
que le téléphone sonne. Leena décroche
et entend une voix de femme au bout du fil, une voix
qu'elle pensait avoir rayée de sa mémoire,
celle de sa mère. A partir de cet instant, plus
rien ne sera comme avant...
Ce
film est une nouvelle variation du thème "Qui
suis-je ? où vais-je ? dans quel état
j'erre ?" C'est l'adaptation d'un roman —
paru en 2006 —
de l'écrivaine Susanna Alakoski (née en
1962), le portrait d'une jeune immigrée finlandaise
à l'enfance dévastée par l'alcoolisme
de ses parents et le récit d'un douloureux travail
de deuil. Pendant environ une heure et demie, on fait
des aller-retour entre le temps présent et les
années d'enfance. Les choses commencent par l'arrivée
de la famille Moilanen dans la HLM toute belle toute
propre. On voit Leena découvrir son nouvel univers,
se faire de nouvelles amies, sourire aux promesses d'un
avenir meilleur... Et puis, le père se remet
à boire. A partir de là, tout va évidemment
de Charybde en Scylla. Il y a les matins douloureux,
les parents complètement abrutis par l'alcool,
gisant parfois dans leur vomi ou leurs excréments.
Il y a les moments de crise, les hurlements, les bagarres.
Il y a surtout deux enfants — Leena et son petit
frère Sakari — qui finissent par être
livrés à eux-mêmes et qui, au passage,
prennent parfois quelques coups. Émile Zola en
Suède quoi... Je mentirais si je disais que le
film révolutionne le genre. Par ailleurs, s'il
donne l'occasion à Noomi Rapace —
très en vogue depuis sa prestation dans la trilogie
Millenium — de continuer à surfer sur son
personnage de jeune femme mutique, toute en colère
rentrée, il faut bien avouer que la comédienne
donne souvent l'impression d'être en pilotage
automatique. En fait, si le spectacle finit par nous
toucher, c'est surtout grâce à la jeune
Tehilla Blad —
qui jouait Lisbeth Salander jeune, dans la série
des Millenium —, à ses regards, à
sa voix, à sa façon d'incarner cette pauvre
gosse. La véritable pierre angulaire du film,
c'est elle. Incidemment, le titre original n'est pas
facile à rendre en français. Littéralement,
le mot "Svinalängorna" désigne
des loges à cochons, mais, dans l'histoire, il
traduit la façon méprisante dont les Suédois
désignent le quartier où sont logés
les immigrés finlandais ; autrement dit "la
porcherie", "le trou à rats",
"le dépotoir". S'il sort un jour en
France, ce film aura malheureusement droit au titre
anglais "Beyond". |
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En
enkel till Antibes / Un aller simple pour Antibes
(Richard Hobert, 2011) |
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De
nos jours, à Luleå (au nord de la Suède),
George Olsson vit une retraite paisible, consacrant
son temps à jouer aux échecs avec son
vieil ami Olof et à surveiller sa jeune auxiliaire
de vie — Maria — qui le dépouille
patiemment, telle une pie voleuse. Et puis, le jour
de ses 73 ans, voilà que ses enfants Johan et
Susanne débarquent de façon un peu inattendue.
Flairant un coup fourré, il joue d'abord au vieux
papa sénile, puis, comprenant ce qui se trame
dans son dos, il décide de faire un dernier coup
d'éclat...
Inutile d'en dévoiler davantage. Sachez simplement
que la suite est un mélange de "road movie"
et de "buddy movie". George et Maria se voient
bientôt contraints de faire route ensemble, et,
comme le veut la règle, on voit leur relation
évoluer au fil du temps. Si certains critiques
— en Suède — ont fait une fixette
sur les clichés, les invraisemblances, voire
le côté prétendument "fauché"
de la réalisation, il s'est quand même
trouvé quelques voix pour dire que le film était
plutôt pas mal. Et il est vrai que le couple Sven-Bertil
Taube (77 ans) / Rebecca Ferguson (28 ans) fonctionne
vraiment bien. Le jeu de ping-pong entre le vieux sage
et la gredine — véritable petite punaise,
mais avec de beaux yeux et, parfois, un sourire charmant
— est tout à la fois mordant, drôle
et attendrissant. Par ailleurs, il y a dans cette réflexion
sur la vie, l'amour, la mort, un petit quelque chose
qui ne va pas sans rappeler "Les fraises sauvages"
(Ingmar Bergman, 1957). Enfin, vu de France, l'aspect
carte postale de certaines séquences —
où l'on retrouve une Suède telle qu'on
l'aimait dans les années 80 — apporte son
lot de dépaysement. |
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Någon
annanstans i Sverige / Ailleurs en Suède
(Kjell-Åke Andersson, 2011) |
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De
nos jours, dans le nord de la Suède, on voit
s'entrecroiser les destins de plusieurs personnes. Il
y a Erik et Anneli qui sont retournés au village
pour fuir la violence de Stockholm. Janne et Krille,
deux voyous qui préparent un cambriolage. Stefan
qui va souhaiter un bon anniversaire à son père
en compagnie de Sara. Ove qui noie son ennui dans la
boisson et dans les bras des femmes de ses voisins.
Le vieil Anders Eskilsson qui surveille les alentours
avec son fusil à lunette. Un commissaire de police
qui aimerait bien reconstituer le déroulement
d'une nuit sanglante. Et... pour les observer tous...
Ralf, l'idiot du village.
De la "joie" et du "bonheur" que
l'on peut éprouver à vivre dans une petite
bourgade perdue dans la campagne du Norrbotten (7 habitants
au km² ; la moitié de la densité
de la Lozère). C'est un nouvel opus à
ajouter à la longue série des films que
d'aucuns — en Suède — se plaisent
à ranger dans la catégorie "Jag mår
illa" ou "je me sens mal". Ici, Kjell-Åke
Andersson nous dresse le portrait d'une petite communauté
à l'écart du monde, sorte de plaine des
Asphodèles où les individus semblent condamnés
à vivre dans un isolement perpétuel. Les
rues sont quasi désertes, les autocars sont presque
vides, les rares personnes qui passent devant la caméra
font une tête de six pieds six pouces ; c'est
la fête au village. Certains verront dans cette
description d'un monde en vase clos — peuplé
de pauvres gens et d'abrutis alcoolisés, de malheureux
ne sachant plus communiquer, d'êtres décérébrés
par la télévision, votant forcément
pour le SD* — une critique sociale, une charge
contre la Suède "profonde". D'autres
n'y verront qu'une représentation sarcastique
d'un petit monde à la dérive, d'un monde
en perdition où la fuite est la seule planche
de salut. C'est selon. Une chose est sûre, le
film ne se résume pas à une simple juxtaposition
de saynètes lugubres où l'on déprime
pour le plaisir de déprimer. Il y a bel et bien
une histoire, avec une trame, un dénouement.
Il y a même une bande originale très pince-sans-rire,
à la Danny Elfman. Et lorsque l'on arrive au
bout de l'aventure — à l'image du vieil
Anders qui pose la dernière pièce de son
puzzle noir comme une robe de pasteur — on reste
un moment pantois, riant intérieurement d'avoir
été si habilement baladé. Sous
des dehors quelque peu "rebutants", c'est
un film auquel on peut donner sa chance. Il produit
son petit effet et vous trotte un moment dans la tête.
* les Démocrates suédois ; l'équivalent
du Front national chez nous. |
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