Titres commentés : 118 / Mise à jour : Moln över Hellesta (Suède, 1956)
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Kino Digital : Cinéma nordique
Ici, on vous invite à survoler en quelques pages les notules "critiques" présentes sur certains tests dvd de la rubrique "Cinéma nordique" de Kino Digital. Les films — inédits en France — sont classés par années de sortie. Dans une même année, le classement est fait par ordre alphabétique de titres originaux. Vous trouverez essentiellement des films suédois, mais aussi quelques titres norvégiens, danois, islandais et finlandais. Bien sûr, les avis exprimés ici n'engagent que le ouebmestre du site.
 
Suède - les années 1940
Swing it, magistern ! / Mademoiselle swing et son professeur (Schamyl Bauman, 1940)
A la toute fin des années 1930, Agda Löfbeck, redoutable directrice d'une école privée, recrute un nouveau professeur de chant sans se douter un instant qu'elle vient d'introduire un loup dans la bergerie. De fait, le bonhomme — qui a plutôt les idées larges — est amateur de jazz, et, le jour où une de ses élèves se risque à chanter un air de swing en classe, il ne fait rien pour la dissuader ; bien au contraire. Ne faisant ni une ni deux, le vieux dragon monte sur ses grands chevaux, interdit formellement à son employé et à son élève de recommencer. Seulement voilà : tout ceci n'était que la partie émergée de l'iceberg ; les deux éléments perturbateurs lui réservent bien des surprises encore...

Ce film, sorti en Suède le 21 décembre 1940 (à cette époque, les armées allemandes occupaient déjà une bonne partie de l'Europe) est le premier grand succès d'Alice Nilson — alias Alice Babs — petit prodige de la chanson d'alors. Elle avait tout juste 16 ans, un joli timbre de voix et un sourire communicatif. C'est une oeuvre bon enfant, qui respire la bonne humeur, dont le scénario n'a pas grande importance. Seuls les passages chantés comptent. Ainsi, pendant les 87 minutes de film, on entend : "Swing it magistern" (trois fois), "Regntunga skyar" (deux fois), "Swing Ling-Lei" (excellent !) et "Oh boy" (bien entraînant aussi). Cela dit, on serait injuste si l'on résumait le film à la seule présence de la jeune chanteuse. De fait, elle est entourée de quelques comédiens qui ne laissent pas indifférent. Adolf Jahr (1893-1964) — le professeur de chant — a une réelle prestance, l'oeil pétillant et un sourire très hollywoodien. Viran Rydkvist (1879-1942) — la directrice — est très drôle et a parfois des allures de Pauline Carton suédoise (avec un côté "forte en gueule" à la Milly Mathis). Enfin, Thor Modéen (1898-1950) a une rondeur bien sympathique qui n'est pas sans rappeler des comédiens de la trempe de Fernand Charpin (1887-1944)... A titre d'information, on signalera que ce film a provoqué un certain scandale lors de sa sortie. Certains milieux — religieux notamment — n'avaient pas du tout apprécié cette irruption du swing dans les salles de cinéma. Dans quelques journaux, Alice Babs fut qualifiée de "garce" tout juste bonne à "recevoir une fessée" et à être "renvoyée sur les bancs de l'école". Selon les mêmes chroniqueurs, la musique qu'elle interprétait ne pouvait être écoutée qu'au fin fond de l'Afrique, au milieu des hyènes et des singes (du reste dans le film lui-même, le professeur de chant se fait traîter par la directrice de "Tarzan" et de "Jazz-Hottentot"). Fort heureusement, il se trouva aussi des plumes pour la défendre et pour dire que si l'on n'avait pas le sourire après avoir vu ce film, c'est que l'on n'était pas tout à fait normal.
 
Första divisionen / La première escadrille (Hasse Ekman, 1941)
En 1941, en Suède, le sous-lieutenant Gunnar Bråde (Hasse Ekman) rejoint la première escadrille de bombardiers en piqué après une période de convalescence consécutive à un accident. Là, il retrouve son vieux camarade Bertil Johansson et passe de longs mois à s'entraîner en compagnie du capitaine Krister Hansson — qui a des problèmes de couple — et du lieutenant Rutger Sperling — qui a des problèmes de vue —, sous le regard paternaliste du colonel Ståhlberg...

A la lecture des lignes qui précèdent, difficile de ne pas penser "Mm... quelle histoire alléchante !" Mais on ne peut pas aborder ce film sans le replacer dans son contexte de guerre. Au début du tournage, l'armée allemande — qui venait de s'emparer de la Yougoslavie et de la Grèce — commençait son invasion de la Crète. La Norvège et le Danemark étaient occupés, la Finlande devait se préparer à l'offensive d'été contre l'Union Soviétique, et, au milieu de tout ça, la Suède était le seul îlot de paix. Le climat dans le pays était plutôt à l'inquiétude et "Första divisionen" apparaît comme une expression de l'angoisse collective. S'il ne se présente pas comme un pur film de propagande — ici, Hasse Ekman ne va pas bombarder l'ennemi en chantant joyeusement "Wir sind die schwarzen Husaren der Luft" comme Carl Raddatz et ses amis pilotes dans le "Stukas" de Karl Ritter —, il fait partie des "beredskapsfilmer", ces films de "vigilance patriotique" que les studios suédois tournaient depuis 1939 pour entretenir l'esprit de défense. On y voit des avions, beaucoup d'avions (sur 88 minutes de film, environ 22 minutes sont consacrées à l'entretien, à l'envol et aux bombardements en piqué des Northrop 8A-1 rebaptisés B-5), de jeunes militaires motivés, soudés par la camaraderie, s'entraînant sans relâche pour défendre la patrie. On y voit aussi des jeunes femmes et des mères prêtes à accepter les conséquences de cet engagement. Bref : "Dormez en paix, braves gens, l'armée veille"... En soi, le spectacle n'est pas honteux, il se laisse regarder, mais il passionnera surtout les amateurs d'aviation militaire "ancienne".
 
Magistrarna på sommarlov / Les professeurs en vacances (Schamyl Bauman, 1941)
Vers 1940, l'année scolaire touche à sa fin, les élèves de l'institution Löfbeck reçoivent leurs carnets de notes. Les résultats d'Inga Danell et de son frère Acke n'étant que partiellement satisfaisants, leur mère décide d'engager un répétiteur pour le temps des vacances. Elle passe une annonce et c'est le propre fils de la directrice qui — bien malgré lui — décroche le poste. Mais qu'à cela ne tienne : profitant d'un voyage de son dragon de mère, le garçon se fait remplacer par son ami Gösta Holmgren et ce qui ne devait être qu'un été studieux sur une île de l'archipel de Stockholm tourne bientôt au sac d'embrouilles...

Ce troisième film d'Alice Babs Nilson est la suite directe du "Swing it, magistern !" sorti l'année précédente. On y retrouve les mêmes personnages et les mêmes comédiens. Bien sûr, l'objectif principal n'a pas changé : il s'agit de donner à la jeune comédienne l'occasion de se livrer à quelques numéros de chant. Ainsi, pendant les 82 minutes de film, on peut entendre "En liten smula kärlek" (deux fois), "Ljuva natt" (version swing de "Belle nuit, ô nuit d'amour" d'Offenbach), "Jag sjunger min swing ändå" et "Vilket skulle bevisas". Cela dit, il faut reconnaître qu'il a été fait un petit effort côté scénario et que certains rôles ont été enrichis : ceux des professeurs (comme l'indique le titre du film) et celui d'Acke, le frère d'Inga. Enfin, si l'on est bien attentif, on remarquera que le scénariste et le(s) parolier(s) se sont même permis quelques petites audaces contestataires. On a d'une part de petits coups de griffes à l'encontre de certaines conventions sociales (voir les discussions entre les professeurs et leur patronne) et, d'autre part, un joli règlement de compte avec les détracteurs du film précédent. De fait, au bout de 51 minutes, la jeune fille se met à évoquer — en chanson et avec de grands sourires — les articles dans lesquels certains esprits chagrins l'avaient traîtée de "garce" après la sortie de "Swing it, magistern !" "Ils peuvent trouver que mes chansons sont niaises et détestables, ils peuvent ronchonner et me harceler, mais je chanterai quand même du swing !" Paroles que le public — cela va sans dire — applaudit chaleureusement ensuite.
 
Vårat gäng / Notre équipe (Gunnar Skoglund, 1942)
Au début des années 1940, à Stockholm, dans le quartier populaire de Södermalm, un groupe de jeunes se voit contraint d'abandonner son local aux pioches des promoteurs. Ils sont provisoirement hébergés par le vieux Blomqvist — marchand de bois de son état — mais doivent trouver au plus vite le moyen de gagner de l'argent pour s'offrir un nouveau local. Un soir, il est décidé d'organiser une fête avec bal, buffet et numéros de chant. A n'en pas douter, l'affaire sera couronnée de succès, car depuis peu, le groupe s'est enrichi d'une nouvelle recrue : Alice Bergendahl, la fille d'un organiste d'Örebro récemment installé dans le quartier, une jeune femme douée d'un véritable talent de chanteuse. La fête a lieu, commence sous les meilleurs auspices, quand, soudain, des caisses de feux d'artifice se mettent à exploser...

Cette histoire de "belle équipe" cherchant à réparer les dégâts dont elle est responsable est le quatrième film d'Alice Babs (pendant le tournage, en 1941, elle avait 17 ans). Les diverses péripéties du film ne sont qu'un prétexte pour lui permettre d'effectuer divers numéros de chant. On l'entend ainsi interpréter "Här på Söder", "Låt mig bli med", "Stigbergsgatan 8", "Vårat glada gäng", un pot pourri (avec entre autres "Jitterbug från Söder", "Alice i Tyrolen", "Så svänger vi ett tag") et "Paradens glada trall". Si l'esprit général est plutôt au "swing" et au "fox trot", on entend aussi des choses plus inattendues comme du jodel (chant à la tyrolienne). Sous des apparences légères, le film aborde une fois de plus le thème du conflit de générations. On y voit beaucoup d'adultes grincer des dents devant la nouvelle culture adolescente imprégnée de jazz (dans "Swing it, magistern !" c'était le milieu enseignant ; ici, ce sont surtout les milieux religieux). Le scénario et la réalisation n'ont pas beaucoup d'importance. Le film est juste une occasion de faire la fête, d'oublier un moment qu'au même instant le reste de l'Europe était à feu et à sang.

 
Ombyte av tåg / Entre deux trains (Hasse Ekman, 1943)
À Stockholm, à la fin de l'année 1942, Inga Dahl — comédienne sans emploi — est prise d'un malaise dans la rue après avoir été éconduite par le metteur en scène Leo Waller, son ancien amant. Quelques jours plus tard, un médecin lui apprend qu'elle a le coeur fatigué et lui recommande le plus grand repos. Elle décide alors de quitter la capitale pour retourner à Viköping, sa ville d'origine. Chemin faisant, lors d'une correspondance entre deux trains, elle a la surprise de tomber sur Joakim Lundell, jeune homme qu'elle avait aimé avant Leo Waller, et qu'elle n'avait pas revu depuis six ans. Ils s'installent à une table du café de la gare et se mettent à évoquer le bon vieux temps...

Disons-le sans ambages, on a là — 23 mois avant le "Brief encounter / Brève rencontre" de David Lean (1945) — une gentille histoire sentimentale que ne renieraient pas les éditions Harlequin (un critique suédois de l'époque alla jusqu'à parler de transposition à l'écran de "roman pour boniches"). Cela dit, si l'on fait abstraction de la psychologie assez improbable des personnages — dans ce film, le maître-mot est "équanimité", tout se passe dans la douceur, sur fond de valse mélancolique — l'ensemble remplit parfaitement sa mission. Le directeur de la photographie a travaillé ses éclairages, le personnage incarné par Sonja Wigert — étonnante synthèse de Vivien Leigh (les yeux) et de Paulette Goddard (le sourire) — arrive à nous toucher, à nous émouvoir même, et il y a dans les dernières minutes un tout petit suspense qui ne gâte rien.
 
Barnen från Frostmofjället / Les enfants de Frostmofjället (Rolf Husberg, 1945)
Dans le nord de la Suède, au milieu du XIXe siècle, une veuve meurt en plein hiver. Ses sept enfants — Ante, Maglena, Monke, Anna Lisa, Per Erik, Brita Kajsa et Kristina — décident de prendre leur destin en main et s'en vont vers le Sud, à pied, dans la neige, à travers les forêts immenses, avec pour seul secours les mammelles de leur fidèle chèvre Gullspira et l'hospitalité des gens croisés ici et là...

Oh le gros mélo que voilà ! De fait, l'histoire joue à fond sur l'empathie du spectateur envers les enfants (surtout les plus petits). Cela déborde de bons sentiments et de bonne morale chrétienne (les gosses ont une moralité exemplaire, la plupart des adultes ont le coeur sur la main). Au fur et à mesure que le film avance, on ne peut s'empêcher d'avoir un pincement au coeur en voyant le petit cortège fondre comme neige au soleil (les enfants sont adoptés les uns après les autres), on tremble pour la chèvre (va-t-elle arriver vivante au bout du périple ?), et l'on se dit que la vie était bien rude pour les pauvres gens de ces contrées boréales. Alors... à prendre ou à laisser ? On dira qu'il s'agit surtout un film pour enfants des années 1940-50 et... pour grands enfants d'aujourd'hui.
 
Musik i mörker / Musique dans les ténèbres (Ingmar Bergman, 1948)
En Suède, à la fin des années 1940, Bengt Vyldeke perd la vue au cours d'un exercice militaire. S'ensuit une rééducation à la vie et au bonheur, grâce à la musique, et, surtout, à la jeune et jolie Ingrid...

Il s'agit du quatrième film réalisé par Ingmar Bergman. A bien lire les notes qui figurent dans les suppléments du DVD, le metteur en scène avait voulu montrer en adaptant cette histoire écrite par Dagmar Edqvist qu'il savait filmer autre chose que des histoires austères. De fait, sans être pour autant "guilleret", c'est un film qu'on peut — paradoxalement — ranger parmi les oeuvres "lumineuses" du réalisateur. On est bien loin, par exemple, de "Tourments" (Hets, scénarisé par lui en 1944) où Mai Zetterling tenait un rôle beaucoup plus torturé. De même, le film joue sur un tout autre registre que celui de "Ville portuaire" (Hamnstad) qui sortira quelques mois plus tard... Certains y verront peut-être une sorte de premier jet soft de "Vers la joie" (Till glädje, 1950), d'autres n'y verront qu'une bluette sentimentale toute à la gloire de Mai Zetterling (plutôt mise en valeur ici, avec des éclairage dignes du Studio Harcourt)... Pour le reste, les connaisseurs auront plaisir à retrouver dans de petits rôles Naima Wifstrand, Gunnar Björnstrand, Bengt Eklund... et ils s'amuseront même à voir Ingmar Bergman jouer les Alfred Hitchcock à la toute fin du film, dans la scène du train.
 
Jungfrun på Jungfrusund / La Demoiselle de Jungfrusund (Ragnar Arvedson, 1949)
A la fin des années 1940, dans les environs de Västervik, la jeune Eva Kron s'en revient d'un voyage à Paris où la fréquentation du beau monde et des boutiques de mode a fait d'elle une épouvantable snob. Un jour où elle se montre particulièrement odieuse avec une employée de maison, son père décide de lui donner une leçon : pendant une semaine, les deux jeunes femmes échangeront leurs rôles ; les tâches domestiques pour la jeune héritière, la place de jeune fille du monde pour la servante. Mais ce qui ne devait être qu'un simple pari se met vite à devenir une drôle d'aventure quand trois jeunes officiers de la marine font irruption sur l'île qui abrite le manoir de Valdus Kron...

Voilà une comédie romantique qui ne paye pas de mine — pour un spectateur français de 2008 à tout le moins — et qui, pourtant, est une heureuse surprise. De fait, cette histoire de pari sur fond de lutte des classes est assez amusante et elle se laisse voir avec plaisir. Ludde Gentzel — qui tient le rôle du chef d'entreprise "bon papa gâteau" — a une bonhomie communicative, Sickan Carlsson — la jeune domestique — a un physique sympathique de bru idéale, et Inger Juel — la jeune snob — a une vraie tête de garce. Ajoutons à cela les balades en bateau le long des côtes du Småland et l'on tient là un petit film populaire qui mérite le coup d'oeil. Pour l'anecdote, on signalera que Sickan Carlsson — 34 ans à l'époque — en était à son trentième film et qu'elle jouissait alors d'une forte popularité. Elle enchaîna les tournages jusqu'au début des années 1960 puis sa carrière s'éteignit doucement. Quant à Inger Juel — la "méchante" de service, 23 ans au moment du tournage —, elle n'avait commencé sa carrière qu'en 1947, mais en était déjà à son sixième film. Elle eut une filmographie moins riche que celle de Sickan Carlsson et mena en parallèle une carrière de chanteuse.
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