Fabas - 14 août 1752 - Dufour
inventaire après décès
14 août 1752 : à Fabas, vers midi, le notaire de Saint-Frajou procède à l'inventaire après décès de Jean Dufour, voiturier, décédé depuis trois semaines. L'inventaire est fait à la demande de Françoise Couture, veuve de Jean Dufour, avec lequel elle a eu au moins deux enfants encore vivants mais mineurs : Jean et Jean François. Il est également fait en présence de : Jacques Dufour et Paule Soulé, mariés, habitants de Polastron-Bourjac, parents du décédé ; Barthélémie Salières, habitante de Fabas, belle-mère du décédé ; Jean Dufour, meunier de Francon, frère du décédé ; autre Jean Dufour, meunier de Montégut-Bourjac ; Raymond Dufour, voiturier, habitant de Polastron, également frère du décédé.

Avant de commencer, le notaire précise que l'inventaire est fait sans préjudice des hypothèques et droits que Françoise Couture pourrait prétendre sur l'hérédité de son mari. Il signale aussi que Barthélémie Salières réclame une part de l'hérédité, arguant du fait que son gendre avait tiré profit de biens possédés par elle pendant une année (année pendant laquelle elle avait vécu ailleurs). A quoi, les parents du défunt répondent que sa demande n'est pas fondée parce qu'après son retour, elle avait vécu dans la maison de son gendre pendant trois ans et que, partant, elle se trouvait largement remboursée. Par ailleurs, ils déclarent qu'elle aurait dû formuler sa demande avant le décès de son beau-fils. Barthélémie Salières persiste néanmoins dans sa demande.

Sur quoi, le notaire procède à l'inventaire. Dans un premier temps, il entre dans l'écurie qui se trouve orientée au sud-est de la maison et y trouve :

- 1 cheval de poil gris âgé de 8 ans
- 1 cheval de poil noir, avec une marque blanche sur la tête, âgé d'environ 10 ans
- 1 cheval de poil châtain âgé d'environ 12 ans
- les harnais pour chacun des chevaux (hobardes* à moitié usées et rapiécées, sangles, licols, brides)
- 2 petites clochettes en bon état
- 2 petites clochettes félées
- 2 bâts en bon état
- 2 bâts à moitié usés
- 2 paires de balances garnies de leurs cordes
- 7 sacs d'étoupe en bon état (dont 1 rapiécé)
- 20 sacs d'étoupe en mauvais état, tous rapiécés, presque hors d'usage
- 4 jeux de corde de chanvre
- 1 jeu de corde en fil du pays
- 1 foret tordu à moitié usé
- 2 paires de vrilles à moitié usées

En second lieu, le notaire entre dans la maison et dans la pièce où se trouve la cheminée. Il y trouve un lit et d'autres effets appartenant en partie à Françoise Couture. Cette dernière désigne les effets qui étaient à son mari, à savoir :

- 1 lit composé de couette et coussin bien emplumé, le tout presque neuf
- 1 couverture blanche en assez bon état
- 1 tour de lit orné de broderies plus qu'à moitié usé
- 1 bois de lit en hêtre rafistolé dans sa partie centrale
- 1 caisson de bois de montagne, ferré, fermant à clef et pouvant contenir environ 1 sac.

Le notaire fait ouvrir le coffre et en sort :

- le contrat de mariage du défunt avec Françoise Couture, passé le 15 janvier 1741 devant Me Daran
- 1 acte de vente de terre labourable par Pierre Deprax, daté du 4 mars 1747, devant Me Daran
- 1 acte de vente d'une vigne située à Coueilles par Jean Senarens, devant Me Daran

A quoi il ajoute** :

- 3 chaises en bois de cerisier et chêne en assez bon état
- 1 paire de chenêts de fer pesant environ 20 livres
- 1 broche à rôtir en fer
- 1 cassette de cuivre en assez bon état
- 1 cuiller à tremper la soupe en fer en assez bon état
- 1 lampe en laiton en très bon état
- 1 habit de cadis brun neuf (justaucorps, veste et culottes)
- 1 habit de rase gris blanc très usé et rapiécé (justaucorps, veste et culottes)
- 1 habit de droguet très usé et rapiécé (justaucorps, veste et culottes)
- 1 paire de guêtres en droguet en bon état
- 1 paire de guêtres en droguet en mauvais état et rapiécées
- 1 paire de bottines très usées
- 1 paire de bas en estame usés et rapiécés
- 2 paires de bas en laine usés et rapiécés
- 3 chemises en toile de lin en bon état
- 3 chemises en toile de lin à moitié usées
- 3 paires de souliers pratiquement hors d'usage
- 1 paire de boucles de fer
- 1 couette emplumée à moitié usée

Ensuite, Françoise Couture conduit le notaire hors de la maison, dans la rue, et, dans un recoin sur le chemin, elle lui montre :

- 1 petit foinier
- 1 grand foinier

Ces foiniers, où il peut y avoir 10 chars de foin, ont été achetés à messieurs les curés de Fabas et Saint-Pé d'Arès et à François Sentignan (habitant de Fabas) et ils n'ont pas encore été payés. Les héritiers de Jean Dufour doivent donc 50 livres au curé de Fabas, 8 livres 10 sols au curé de Saint-Pé et 12 livres à François Sentignan.

Là-dessus, le notaire demande s'il n'y a pas d'autres effets à inventorier. Françoise Couture, les mains posées sur les Saints Évangiles, jure que non. Elle signale toutefois : 1) que son mari a confié à Joseph Mirepoix, chargeur au quartier du Plan, une certaine quantité de laine filée, de quoi faire environ 6 ou 7 cannes de toile de cadis, 2) que lorsque son mari est mort elle a vendu un cheval et une mule qui lui appartenait pour la somme de 90 livres***, 3) qu'en cherchant dans les effets de son mari elle a trouvé la somme de 62 livres. Après quoi, elle énumère les débiteurs de son défunt mari :

- le sieur Jean Desbarax, de Fabas, doit 48 livres
- la nommée Ducassé, d'Aurignac, doit 5 livres
- Jean Dufour, frère aîné, doit 7 livres 2 sols
- Jean Dufour, frère cadet, doit 2 livres 10 sols

Françoise Couture déclare avoir besoin de cet argent pour : 1) acheter des habits de deuil (pour elle et ses enfants) et pour payer les funérailles et prières à Dieu pour le repos de l'âme du défunt, 2) rembourser les curés de Fabas et Saint-Pé d'Arès et François Sentignan.

Elle énumère ensuite les créanciers de son mari :

- le sieur Layre de la Hillère, de Fabas, pour 50 livres et 1 mesure d'avoine
- le sieur Jean Dario, menuisier de Fabas, pour 34 livres 12 sols
- le sieur Louis Dufaut, de Fabas, pour 36 livres 15 sols 6 deniers
- l'église de Fabas, pour 4 livres de blé
- le fouleur du quartier de Manan, pour 4 cannes 2 pans de cadis d'une valeur de 11 livres
- Paul Laforgue, de Martignan, pour 2 livres 16 sols
- le sieur Loubière, de Fabas, pour 9 livres
- les boulangers de Fabas, pour 2 livres 8 sols
- le sieur Dario, chirurgien de Fabas, 8 livres 12 sols pour les soins, drogues ou médicaments
- un marchand de sel du Fousseret pour 1 mesure de sel évaluée 2 livres 10 sols.

Françoise Couture déclare également que son mari avait 5 chevaux qui servaient au transport des fermes de Saint-Frajou, L'Isle-en-Dodon et Escanecrabe. A ce jour, sur les 20 sacs de grains de toutes espèces (à la mesure d'Aurignac) que sont censés lui rapporter ces chevaux, elle n'a perçu que 5 sacs de caron et 6 mesures de blé (à la mesure de L'Isle-en-Dodon) et attend le reste, soit : 12,5 sacs de blé froment et 1 sac en caron, avoine ou fèves.

Pour finir, le notaire déclare que les effets inventoriés ont été évalués à la somme de 390 livres, y compris les 62 livres trouvées après le décès de Jean Dufour, mais non compris les 90 livres provenant de la vente du cheval et de la mule. Fait et lu en présence de Jean Salières, prêtre et vicaire de Coueilles, et du sieur Jean Dario, menuisier de Fabas, qui signent avec le notaire. (ADHG 3E 25700 f°1180-1181vo - Daran)

 
1) ou "aubarde", c'est-à-dire "barde" : longue selle de grosse toile, piquée et bourrée.
2) On ne sait pas si tout se trouvait dans le coffre.
3) Ce cheval et cette mule pourraient avoir appartenu à Françoise Couture, car les 90 livres provenant de leur vente ne sont pas incluses dans le décompte final.

Mots difficiles

cadis : étoffe de laine ; serge de laine (Littré).
canne : mesure de longueur, environ 1,828 mètre à la mesure de L'Isle-en-Dodon.
caron : mélange d'orge et de blé.
droguet : étoffe de laine de bas prix (drogue, chose de mauvaise qualité).
estame : laine tricotée.
étoupe : toile grossière de chanvre ou de lin.
foinier : construction servant à entreposer et/ou à faire sécher le foin ?
fouleur : ouvrier qui foule les draps ("foulon" : artisan qui prépare les étoffes de laine en les faisant fouler au moulin).
mesure : la mesure sert surtout pour les superficies. Ici, on peut penser qu'elle est citée à la place de la "razée" (qui vaut 1/4 de sac ou 8 boisseaux, soit environ 26,30 litres). Dans ce cas 6 mesures de blé pourraient valoir 1,5 sac.
pan : mesure de longueur, 22,85 cm à la mesure de L'Isle-en-Dodon.
rase : ou "ras", étoffe croisée et unie dont le poil ne paraît pas (Littré).
sac : mesure de capacité, environ 105 litres.