Le
19 août 1857, Paul François Dufaut, propriétaire
et conseiller municipal de Fabas se rend à
la maison commune à neuf heures du matin et
se présente devant Angel Despouy, maire de
Fabas faisant les fonctions d'officier auxiliaire
de police. Il lui demande de procéder à
l'instruction de faits qui se sont produits dans la
journée du 18 et dans lesquels a été
impliqué le Sr Pierre Lajous, meunier et cabaretier,
habitant du même lieu.
Il
déclare : que vers les huit heures du soir
il avait envoyé ses chevaux à l'abreuvoir
public sous la conduite de son jeune domestique Jean
Simon Dader, âgé de 16 ans ; que celui-ci
s'était vu barrer le chemin de façon
menaçante par le sieur Lajous qui était
en train de battre du grain sur la voie publique ;
que le jeune domestique avait opposé une certaine
résistance et que ne pouvant aboutir à
l'abreuvoir il avait suggéré au Sr Lajous
de prendre lui-même la direction des chevaux
pour éviter de détériorer l'aire
dépicatoire par ailleurs indûment établie
sur un lieu qui dans aucun cas ne doit être
obstrué puisqu'il sert à toute la population
agglomérée du village ; que malgré
cette concession le Sr. Lajous s'était opposé
de plus fort à la libre circulation des chevaux
qui ne purent donc être abreuvés ; qu'une
fois rentré chez son maître, le domestique
avait fait part de cette résistance brutale
; que devant cette situation insolite Auguste Jean-Baptiste
Dufaut fils était monté sur un cheval
et s'était dirigé lui-même vers
l'abreuvoir, ne voulant pas céder aux menaces
du Sr Lajous et s'éviter le désagrément
de parcourir une distance de plus d'un kilomètre
pour aboutir à un autre abreuvoir ; qu'à
la vue de M. Duffaut fils le Sr Lajous, armé
d'un long bâton, lui avait fait défense
de passer outre, et que, sans déférer
à l'injonction de libérer la voie il
avait brutalement lancé un coup qui, heureusement,
n'avait atteint que la tête du cheval ; que
cette résistance avait été accompagnée
de circonstances extrêmement graves ; qu'une
lutte s'était établie entre Duffaut
fils, impassible, et le Sr Lajous, très violent
; qu'en voulant diriger son cheval vers l'abreuvoir
M. Duffaut fils avait été constamment
repoussé par le Sr. Lajous, et que la femme
de ce dernier connaissant son caractère violent
et emporté avait prié M. Duffaut de
se retirer ; que cette scène violente avait
eu lieu en présence de plusieurs témoins
tous indignés de la conduite du Sr Lajous ;
que ces dernier lui avaient dit « Laissez-le
donc passer », et qu'il avait répondu
« Il ne passera pas » ; que vers les dix
heures du soir le déclarant rentrant chez lui
avait appelé son neveu Philippe Duffaut qui
se trouvait chez le dit Lajous ; que ce dernier s'était
livré à des injures contre lui et lui
avait déclaré que si personnellement
il voulait lui-même conduire ses chevaux à
l'abreuvoir, il était fort douteux qu'il le
laissât passer ; que dans la journée
du 19 le Sr Lajous avait fait un signe très
expressif à son jeune domestique ; en conséquence
de quoi il a été dressé un procès-verbal.
Après
avoir signé sa déclaration, Paul François
Dufaut présente divers témoins : le
Sr Jean Guillaume Mirepoix (21 ans, cultivateur),
le Sr Baptiste Victor Moudens (22 ans, soldat en congé
temporaire et maçon de son état, habitant
de Fabas), le Sr Jules Jean Marie Laurine (23 ans,
coutelier), le Sr [Jean Marie] Joseph Dulac (42 ans,
cordonnier), le Sr Jean Duffort (50 ans, tailleur
d'habits), le Sr Jean Simon Dader (16 ans, domestique
chez M. Duffaut), M. Baptiste Lafforgue (46 ans, cabaretier),
M. Jean Pierre Antoine Dario (57 ans, propriétaire),
le Sr Jean Moudens (37 ans, domestique chez M. Lacaze),
le Sr Joachim Adet (37 ans, cultivateur), Marie Ribet,
épouse Lafforgue (40 ans, cabaretière),
le Sr Joseph Laurine (21 ans, forgeron). Chacun d'entre-eux
dépose et raconte sa version des événements.